Les îles oubliées de Polynésie française
Très loin dans
le Pacifique Sud, éparpillées sur l'océan, les îles Australes sont presque
aussi éloignées les unes des autres qu'elles le sont de Tahiti.
Archipel des Australes, une baie de Raivavae |
Orientées sur un axe Nord-Ouest Sud-Est, l’archipel
des Australes s’étirent sur plus de 700 kilomètres au sud de Tahiti, à cheval
sur le tropique du Capricorne. S’il n’est pas le plus éloigné de la capitale
polynésienne, il en est bien le plus isolé, le moins connu et le moins visité.
Les Îles Australes et la géographie
Composé de cinq îles hautes, d’un atoll et d’un
îlot, l’archipel dans son ensemble représente à peine 140 km² de terres
émergées.
Etirées comme un chapelet, les cinq îles
principales des Australes sont encadrées au nord-est par les Îles Maria (Nororotu) et les îlots de Bass (Marotiri) à l’extrême sud-est. Ces deux
derniers groupes étant inhabités. Cette situation géographique fait des Îlots
de Bass les terres les plus sud de toute la Polynésie française.
L'archipel des Australes, le plus isolé et le plus au Sud de Polynésie |
Formées de quatre îlets enfermés dans un même
lagon, les Îles Maria sont le seul atoll de l’archipel. Les quatre Îlots de
Bass, quant à eux, représentent ensembles une surface de terres émergées à
peine supérieure à quatre hectares…
Du nord au sud, les cinq îles habitées des
Australes sont : Rimatara, Rurutu, Tubuai, Raivavae et Rapa. A elles cinq,
elles représentent à peine plus de 6300 habitants (recensement de 2007).
Aujourd’hui, seules Rurutu, Tubuai et Raivavae
disposent d’un aéroport et il n’existe aucune liaison maritime interinsulaire.
C’est une goélette (cargo mixte), et elle seule, qui approvisionne l’archipel
et permet de se rendre à Rapa.
Beaucoup plus frais qu’à Tahiti, le climat tempéré
de ces îles en a fait le potager de Tahiti et Moorea.
Petite histoire de l’archipel des Australes
Comparées aux autres archipels polynésiens, c’est
très tardivement que les Îles Australes auraient été peuplées. Selon les
sources, ce peuplement se serait fait entre le XIe et le XIVe siècle. Aucune
recherche archéologique approfondie n’a cependant encore été menée permettant
de répondre à cette question.
Ce que l’on sait avec quasi certitude, c’est que
les premiers habitants de ces îles venaient de Tahiti.
Rapa, la moins connue des îles Australe |
C’est James Cook, encore lui, qui est le premier
Européen à découvrir une île de l’archipel. Nous sommes le 13 Août 1769 et il
s’agit de Rurutu qu’il baptise Oteroah. Il tente bien d’accoster en envoyant
une baleinière, mais ne peut y parvenir à cause de l’hostilité des habitants.
C’est lors de son troisième et dernier voyage qu’il
découvre Tubuai le 8 Août 1877. S’il n’accoste pas, les insulaires viennent à
sa rencontre. Hélas, une large barrière de corail rend l’île inapte au
mouillage. C’est d’ailleurs cette caractéristique qui décida les mutins de la
Bounty à s’y réfugier.
Les dernières à être portées sur une carte furent
les Îles Maria par l’américain Georges Washington Gardner en 1824.
L’art et la culture dans l’archipel des Australes
Les œuvres d’art produites par le peuple des
Australes sont souvent considérées comme les plus remarquables que l’on ait
trouvées en Polynésie. Hélas, la quasi-totalité de ces œuvres sont disséminées
dans les plus grands musées occidentaux ou dans des collections privées.
L’archipel a littéralement été pillé de son patrimoine dont il ne reste
pratiquement plus rien sur place.
En effet, si les autochtones firent présents de
nombreuses pièces aux marins de passage, certains sites ont été purement et
simplement dépouillés, notamment par les missionnaires de la London Missionary
Society.
Une plage de Rurutu dans l'archipel des Australe |
Ces derniers étaient particulièrement soucieux de
faire disparaitre la moindre trace des anciens cultes. Ainsi, par exemple, sur
les 62 marae recensés au début du XXe siècle à Raivavae, il n’en reste, encore
visibles aujourd’hui, plus que 23.
La plus célèbre des œuvres volées aux Australes se
trouve aujourd’hui au British Museum de Londres. Il s’agit d’une sculpture du
dieu A’a découverte à Rurutu dont il existe une reproduction sur l’île.
Très célèbres aussi sont les pahu (grands tambours verticaux) qui accueillaient les navires de
passage.
De très nombreux objets, de toutes sortes et d’une
grande beauté, furent ainsi disséminés qui montrent une expression artistique
particulièrement développée et raffinée.
Les îles Australes et l’économie
Au-delà d’une agriculture vivrière vitale pour
l’ensemble des habitants de l’archipel, c’est l’agriculture qui est la
principale ressource de ces îles.
Grâce à un climat beaucoup plus tempéré que le
reste de la Polynésie, l’importante production maraîchère des Australes est
exportée vers Tahiti, assurant l’essentiel des revenus financiers des
habitants.
La pêche et l’élevage sont les activités
principales des insulaires. Il est à noter que l’on trouve dans l’archipel le seul
producteur de fromages de chèvres de Polynésie.
La plupart des familles consacrent une bonne partie
de leur temps à un artisanat riche et très apprécié à Tahiti, tant par les
Polynésiens que par les touristes. Les artisans des Australes sont particulièrement
réputés pour une production de vannerie particulièrement riche et fine.
Malgré de très nombreux attraits, l’archipel des
Australes est très peu fréquenté par les touristes. Deux raisons essentielles à
cela : les transports et l’hébergement.
La baie des vierges à Rimatara, îles Australes |
Les liaisons aériennes sont rares, difficiles et
très chères. D’autre part, aucune liaison inter-îles n’existant, il est
impossible de visiter les îles de l’archipel dans un laps de temps raisonnable.
Le seul moyen de le faire est d’utiliser les services de la goélette, ce qui
implique d’avoir le temps, mais la plupart des visiteurs n’en disposent pas.
Si la qualité de l’accueil y est légendaire, les
infrastructures hôtelières y sont pratiquement inexistantes. Les deux seules
solutions sont les rares pensions de familles et l’hébergement chez l’habitant.
Si, en février 2010, les îles Australes ont été
très durement frappées par le
cyclone Oli, l’archipel des Australes n’en demeure pas moins l’une des
destinations les plus surprenantes et les plus marquantes de Polynésie
française. Il est vrai que c’est sans doute là que les habitants ont su le
mieux conserver leur identité et des modes de vie bien loin de ceux qui se sont
développés à Tahiti par exemple…
Quiconque a pris le temps de faire ce voyage en est
revenu marqué à jamais.
Un article de Julien Gué
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