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dimanche 30 octobre 2011

Alain Colinmaire, plasticien


Un voyage en impressions

     Mèche au vent, même en cette tiédeur d’été indien qui arbore des teintes d’automne : l’artiste «guette» -comme il se dit par ici-, l’heure de Réhabilitation, son exposition d’octobre. La fenêtre est ouverte sur une Place des Vosges (celle d'Epinal !) tranquille. Un coucher de soleil, rose indien aussi… se reflète sur les carreaux de la Maison du Bailli.

Alain Colinmaire et un modelé féminin sur sa toile
Coloriste, mais surtout compositeur et interprète des chatoiements qu’il induit, le plasticien spinalien se prépare à livrer ses dernières productions. Le vernissage, c’est toujours le trac de la rencontre ou du rendez-vous manqué.

   La galerie, plein centre ville d’Epinal, redécouvre Alain Colinmaire le prolifique. Elle foisonne d’œuvres accrochées ou sur pied.




Coloriste ou croqueur ? 

  Dans la galerie pas très large, en dédale, au plafond bas (caractéristiques d’une galerie !), les représentations semblent vous happer. Ce n’est pas tant leur proximité que l’énergie qui s’en dégage. Secret d’artiste.

   Un jeu permanent de couleurs : même si elles semblent éliminer les teintes solaires. L’artiste explore d’autres gammes. Et il dispose les réalisations aux masses colorées imposantes, aux extrémités du boyau.

     L’essentiel des couleurs, celles qui donnent sa consistance à l’ensemble de l’oeuvre, se résume souvent à une unité de 2 tons majeurs. Comme en un bouquet serré, elles oscillent autour d’une sorte de mélange entre rose et cochenille, une dizaine de gris et leurs dégradés. Ce qui est déjà énorme. Et puis elles se trouvent rehaussées par le cadre.

« Cible »
    Allez savoir pourquoi : vous ne distinguez rien au départ, rien ne se détache vraiment, mais le tout vous attire, vous retient. La magie des expos : soit elles égratignent votre sensibilité, soit elles touchent votre jardin secret, soit elles établissent une connivence.

   Certains peuvent tout expliquer. Mais la plupart du temps, comme la musique qui berce les fœtus, les couleurs nous accrochent, nous emplissent de sensations. Voilà notre regard apprivoisé par la technique d’un pinceau, d’un couteau.



Des émergences bouillonnantes

    Dans ces espèces de formes nuages, posées sur toile, fond de bois, tentures ou civières, si la patience vous habite, l’effet opère : émergent alors les traits connus de corps, dans leur complétude ou leur morcellement.

    Voilà le talent. Le spectateur ne distinguait pas ce que son œil captait : des silhouettes, des visages aux expressions intenses vous fixant, des corps entremêlés. Le trait est fin, imperceptible.

    Il fallait le trouver. Mais chacun sait que la palette des peintres est inépuisable : non seulement créent-ils des tons incroyables, mais encore osent-ils !

     Et ce qui leur est demandé, aux artistes, c’est de nous faire voyager : que ce soit en nous renvoyant dans les méandres de notre imaginaire ou en nous invitant dans l’univers qu’ils nous proposent.

« EXTASE »
   Le monde présenté par Alain Colinmaire est à l’image de l’actualité : remuante, incandescente, impétueuse et violente.

    Des « installations » montrent ces moments d’intensité que sont les conflits et autres exploitations de la misère humaine : les images sont cruelles, en brèves allusions.



Les hiérarchies du chaos

    L’artiste ne s’appesantit pas vraiment. Même si ses productions ne sont pas neutres, il semble toujours qu’une partie du moment ait été gommée. Comme pour laisser de la place à autre chose. Pour adoucir l’impression ? Pour casser le saisissement qui s’emparerait de nous ?

     Deux étapes se distinguent dans la création de l’Artiste. Celle du geste, de l’acte producteur, vigoureux, effilé, pointu, copieux, mordant. Et celle de la reconstruction en vue de la présenter au public.

      Implicitement les plages de couleurs grisées atténuent les mutilations, les isolent, les noient.

    En fait, le peintre semble en perpétuel duel avec les idées qui le parcourent et s’imposent à lui : leur multiplicité, leur impulsion. Il tient à garder leurs imbrications. Leur concrétisation est complexe.

« le voyeur et l’origine », un clin d’œil à Courbet
    Deux solutions s’offrent à lui : les classer à plat sur la toile ou les empiler en épaisseur, les traiter en profondeur. Pour simplifier, nous pouvons aborder une toile de 2 mètres de haut, où les saynètes bouleversantes, leurs effets, semblent obéir à une logique d’organisation : les cases les encadrent, les trient, les rangent. «Le chaos est structuré» explique l’artiste.

     Dans d’autres tableaux, la succession des thèmes s’effectue par couches : en surface, un transparent qui porte déjà des empreintes parfois brutales ; puis une série de strates, de collages, jusqu’au fond.

    L’impression de vitrail se renforce avec le système lumineux qui l’éclaire de l’intérieur. Dans ce cas l’ordonnancement se trouve moins visible. L’impression d’amalgame, de mouvement fusionnel s’y montre davantage.


Théâtralisation


    Ce qui mobilise l’artiste c’est de construire l’œuvre, en s’y plongeant, c’est d’y pénétrer comme s’il s’agissait d’une inconnue. A le voir, on sent qu’il ne triche pas : que c’est un acte physique, qu’il s’y accomplit en même temps que son œuvre.

     Le résultat surprend l’artiste qui avait entrepris le feuilletage d’origine. L’inattendu se trouve à la clé : votre perception n’est pas la sienne, ni celle de votre voisin. Ne cherchez pas de réponses. Certaines surgissent sans crier gare ou sans vous attendre.

     D’autres surviennent à partir d’un détail, d’un titre, d’une légende, d’une référence à une composition réputée et connue. C’est la disposition des éléments qui en assure l’effet spectaculaire, leur théâtralité. Leur existence de personnage.

« à la recherche de Vénus »
     Si je vous dis que l’artiste vit dans l’une de ces maisonnettes, coincée entre deux et qui grimpent sur plusieurs niveaux (pas moins de cinq) ? Que chacun de ses ateliers successifs est voué à une technique ? Que le plasticien peut commencer par un modelage, qu’il est sculpteur aussi. Qu’il redessine, colle, photographie, modifie, détourne, agence.

     Que la mise en situation de ses représentations vous saisit… déclenche de l’émotion ? L’art, ce langage de l’inconscient.

Un article de MonaK




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