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Le nouveau roman de de Monak à lire absolument

mercredi 22 février 2023

Roti Make expo 2023 : In LOVE


"In Love" de Roti Make

 

       Boostée par Sarahina Birk, concotée pieds dans l’eau à Tahiti, la nouvelle expo picturale 2023 de Roti Make s’est essuyée les retards de reprise culturelle dus à la covid. Paix à son âme. Enfin, Papeete reçoit l’expo "In LOVE" pour une semaine à Fenua Galerie, près du Pont de l’Est.

        Un bout de temps déjà que l’artiste, originaire de Rapa, n’avait trempé son pinceau dans l’acrylique pour nous faire partager ses humeurs.

69 œuvres comme autant de bougies pour débuter l’année  ...

       « 69, année érotique», ainsi que le suggérait Gainsbourg, fut un temps  décomplexé, où la libre expression artistique avait pris son envol, partout dans le monde : ici aussi avec la révolution culturelle marquée par Hiro, Bobby Holcomb, Coco Hotahota et tant d’autres...  

 

Des visages et des corps féminins 

       Qu’elles soient seules, en portrait, en pied, en groupes, les silhouettes sont résolument féminines, excepté pour la dernière série où les vis-à-vis semblent s’ajuster en fonction des partenaires "in love", c’est-à-dire  "en amour ", enamourés, amoureux...

       Mettez-y les genres que vous voulez, vous êtes gagnants !

      Des raisons à tout ça ? Si l’enfance de Roti Make a été celle d’un "garçon  manqué", vu la rudesse de cette période où il lui a fallu  grandir et dépasser les obstacles pour s’épanouir ... elle s’est réalisée dans la couture, en particulier le stylisme et dans l’animation d’une radio culturelle qu’elle a créée...  

Du portrait à ses échos

          Vous pourrez en savoir davantage, car l’artiste vous offre chaque matin de cette semaine une visite guidée de l’expo où vous pourrez lui poser toutes vos questions indiscrètes ou pas . Les enfants sont  favorablement invités, en cette semaine de vacances scolaires : profitez-en...

         Mais si vous êtes comme moi, à vous laisser induire, suborner par l’aspect irréel des tableaux, tentures de tous formats, vous glanerez votre content au cours de la visite. Pas une toile qui ne vous emmène et vous enlève dans un monde fantastique. Peuplé de sentiments, cet univers vous transporte dans ce qui constitue nos moindres émois, la moindre trace du passage du temps.

 

Des facettes aux échos

        Qu’ils soient surlignés de noir ou de blanc, qu’ils soient constitués de puzzle de couleurs variées, qu’ils rassemblent dans la même vision deux profils en une même face, la majorité des portraits et figures exposées vous font voyager dans un monde où la parcellisation est reine...

       De la première mouture style vitrail au module composite où chaque élément corporel est  mis en relief par un motif qui le sépare du reste : il semble que l’accent soit mis la succession des moments plutôt que sur l’unité du  sujet.

     Des motifs multiples que vous voyez poindre, il en est certains qui vous font vagabonder entre tatouages, pointillisme à la manière aborigène...  visage et masque, nature et travestissement...  sans que vous vous déterminiez pour l’un ou l’autre, car l’originalité de l’artiste est préservée... Roti Make  ne participe d’aucune école... et reste elle-même...

Des portraits qui se lisent en plusieurs fois

       En fin de compte, vous êtes bluffés car  rien ne vient  vous  orienter dans votre lecture  :  rien ne vient déranger votre vision. Vous englobez le tout d’une seule pièce. Et seule l’expression  du  sujet principal importe...   et vous guide dans un monde où chaque geste retient la fuite du temps.

        Soit, vous vous laissez induire aux circonvolutions que vous font suivre les traits de l’artiste. Elles s’inscrivent comme une suite de sentiments retenus, voire mélancoliques, et «retiennent le temps, comme les rides» conclut Roti Make...C’est que la toile, comme la peau, vous font osciller aux mouvements que vous proposent toute attitude .

       Mille façons  de lire  une œuvre... Un art particulier que nous devons à son auteure... 

        ...à suivre....

      

Un article de  Monak

 

   Tous droits réservés à Monak & Julien Gué. Demandez l’autorisation des auteurs avant toute utilisation ou reproduction du texte ou des images sur Internet, dans la presse traditionnelle ou ailleurs.

 

mardi 21 février 2023

20ème FIFO : question de genre

 

Question de genre

      

           Prix à la clé, le 20ème Festival International du Film documentaire Océanien (FIFO) ne déroge pas à ce rôle, à travers un jury amputé de l’un de ses membres et du coup, paritaire. D’un côté la récompense attribuée aux réalisateurs des documentaires sélectionnés pour la compétition, de l’autre, l’impact au niveau du public en présentiel à Tahiti ou en ligne : ce qui occasionne bien des débats sociétaux 

          Mais la 20ème session s’est montrée exemplaire dans la mesure où le panorama a largement élargi son panel sur un contenu des plus éclectiques... Entre reconnaissance culturelle à l’international, biopics récents ou anciens, conflits coloniaux irrésolus, aux dommages très lourds et aux injustices qui courent toujours...


Une ségrégation systémique en Océanie...

       Un processus identique semble avoir imposé des choix du même genre dans l’ensemble des films présentés dans le In ou le Off. D’une part, une réhabilitation de l’histoire et des grandes figures - parfois méconnues - qui l’ont tissée. Dame Valerie Adams : More than gold, réalisé de Briar March, qui obtient 1er prix spécial du Jury et le prix du Jury Jeunesse.

D’autre part, une mise en valeur des lieux, des symboles ou des personnalités qui sont parvenues à relever le défi à la ségrégation, aux revers de santé, aux exploits sportifs ou créatifs.

Enfin et inclassable, ce qui subsiste de l’intolérance, de l’impensable, du bilan négatif des diverses cohabitations (incarceration nation, milked, et No Māori allowed, réalisé par Corinna Hunziker qui obtient le GRAND PRIX du JURY.

 

 

Destins de femmes portés par des femmes

          Serait-il significatif que la majorité des films du FIFO primés pour la 20ème session porte sur une thématique largement féminine et ait été concrétisée par des réalisatrices... ? Le fait est, mais apparemment personne ne le signale ni ne lui confère une acception particulière. Sinon qu’il révèle des différences notoires pour aborder les différents sujets. Sans parler des réactions épidermiques d’un public qui n’intègre pas toujours le sens de l’évolution des mentalités.

        La tolérance zéro concernant les autochtones dans leur propre pays, traitée par No Māori allowed en Nouvelle-Zélande, constitue un problème récurrent auparavant comme actuellement, sur la majorité des territoires dispersés sur le continent océanien, indifféremment colonisés par les systèmes britanniques ou français. 




Quand les plus faibles sont victimisées dans leur propre patrie

         D’Hawaï à la Polynésie ou à l’Australie, l’absence de droit ou de maintien du droit à l’égalité ou à l’humanité reste une réalité difficile à admettre pour qui est spectateur impuissant... des écrans du Pacifique. Le malaise est profondément culturel, reposant sur des notions d’infériorité entérinés par les colonisateurs pour s’approprier mentalement et physiquement valeurs, richesses et biens des «Habitants premiers ».

        De même, toute symbolique culturelle, éloignée de la mentalité des conquérants, est rejetée, niée, dévalorisée. Ainsi the healer stones of Kapaemahu, co-réalisé par Hinaleimoana Wong, Dean Hamer et Joe Wilson montre combien la vérité est effacée quand elle dérange : celle du 3ème genre en particulier. 4 Tahitiens MĀHŪ en visite à Hawaï, selon la chronique ancienne, reste cependant symbolisé par 4 Rochers sacrés...

 

Femme et médaillée olympique, un challenge

        Avec une recherche esthétique particulièrement soignée sur l’image, la gestuelle, le cadre sportif, ses balises essentielles, le film insiste sur l’intention de la sportive d’origine tongienne de concilier son statut de femme et sa carrière sportive.

       La maternité fait partie de ces impératifs, voire de ces obstacles qui tronquent ou mettent fin à des objectifs sportifs ou professionnels... Comment peuvent-ils se gérer quand le temps imparti à l’entraînement vous arrache à votre rôle familial ? Comment se détacher de ces poncifs sociétaux culpabilisants qui déterminent la place qui vous revient et oblitèrent celle qui vous épanouit...

 


L’avenir des jeunes générations... ?

      Qu’ils soient primés ou non, les Short documentaires montrent une étroite collaboration entre les réalisatrices et les sujets de leur investigation quand ils sont des personnes. Par exemple, dans mana over meth (NZ) la connivence qui s’instaure entre Holly Beckham, réalisatrice, et Jessica Apanui.

       De même, en Australie, le parcours de la réalisatrice de Maya Newell montre combien elle est proche des personnalités qu’elle choisit toujours dans les franges minoritaires de la population, dont Georgie Stone. The dreamlife of georgie stone, son dernier documentaire a été primé dans la catégorie des Shorts.  Preuve que le sujet captive toutes les générations.

         Alors, des changements dans l’air ?

 

        Un article de Monak

 

   Tous droits réservés à Monak & Julien Gué. Demandez l’autorisation des auteurs avant toute utilisation ou reproduction du texte ou des images sur Internet, dans la presse traditionnelle ou ailleurs.

 

lundi 13 février 2023

20ème FIFO : le comble de l’infection ségrégationniste

Le comble de la pestilence

      Le comble de "l’infection" (sic), semble avoir contaminé atrocement l’atmosphère globale des films en compétition du FIFO 2023... Rarement un film n’avait produit cet effet en 20 ans de Festival ! Preuves et  arguments à l’appui, INCARCERATION NATION de Dean Gibson nous assène l’horreur et le désastre que les générations blanches d’Australie imposent actuellement aux Aborigènes, à travers un terrorisme systémique (Étatique).

      Rarement un documentaire sélectionné au IN du FIFO n’avait atteint un tel degré d’abjection à tous les niveaux de ses rouages : qu’il s’agisse du gouvernement, de la justice, des instances sanitaires, sociales, éducatives et sécuritaires...

           Malgré les lois égalitaires conclues constitutionnellement, aucun nouveau statut ne protège les populations originelles et un système néo-colonialiste raciste ne fait qu’entériner la spoliation initiale, l’esclavagisme, les interdits les plus basiques, les viols, les violences,  : par le biais d’internements automatiques...

Une ségrégation systémique...

          Un important stock de vidéos de surveillance montrent pléthore d’enlèvements d’enfants, nombre d’abus sexuels sur mineurs en détention, de traitements contraires aux droits internationaux et à tous les échelons des forces de l’ordre et de la justice, une totale impunité, voire immunité des contrevenants blancs.

        Il semblerait que la situation n’ait pas évolué d’un iota depuis plus de 2 siècles de conquête ; que la mentalité australienne se soit figée dans le même temps, malgré les tentatives politiques de "réconciliation" et la succession de "Commissions royales", sensées assainir une situation qui dépasse l’entendement et scandalise les mouvements humanitaires...  


À l’autre bout de la chaîne du OFF

          Sauf que, spectateurs tranquilles dans nos sièges , nous n’avons pas à faire face aux enjeux du festival, ni aux critères que s’est choisi le jury, pour être représentatif du documentaire océanien...

       Parallèlement, l’Australien John Hughes signe SENSES OF CINEMA. Un documentaire atypique dans le panorama habituel des documentaires sélectionnés. Car très technique, il analyse le mouvement artistique cinématographique des années 60. Le cinéma expérimental touche et dynamise toute une génération de réalisateurs qui n’hésitent pas à traiter des sujets tabous.

Quand le droit est bafoué... s’engager !

           Les artistes australiens n’hésitent pas à pousser les portes de la perception, à introduire des opinions révolutionnaires, d’avant-garde, à témoigner des métamorphoses de leur époque à travers les mouvements sociaux, les manifestations - concernant notamment la grève des  Aborigènes ... Mais ce qui reste original, même si l’expérience n’a pas duré plus de 30 ans, c’est d’éprouver d’autres modes collectifs d’exploitation...

          Les images qui en résultent et ont été diffusées dans les circuits commerciaux ou éducatifs un peu partout en Australie... et l’aventure vaut le coup d’être partagée.

 

Du deuil à la renaissance les SHORT 

     Tout semble s’expliquer ! En effet, l’influence est interactive entre les films océaniens et la rénovation des coutumes du Pacifique. KAVA’O AOTEARUA (N-Z) de Joshua Teariki Baker les adapte à l’époque actuelle et aux participants. Et au niveau du FIFO, la coutume du kava s’est cérémonieusement mise en place.

        Les habitudes culturelles familiales ne peuvent être effacées par un régime politique : HE OHAKI de Kararaina Rangihau (N-Z) revient aux valeurs humaines universelles que se sont permis d’éradiquer les régimes colonisateurs.

   Entre la précipitation et le savoir-faire ancestral, une contrée dévastée MOURNING COUNTRY (AUST) de Andrew Kaineder et des pratiques de jachère aquatique en voie d’expérimentation : RAHUI (PF) de Mélissa Constatinovitch.

           

Un combat des jeunes générations... ?

          Un pari pour la vie avec FAST EDDIE (NZ) de Keely Meechan : quand diminué, il opte pour le risque.

         Quand le combat est une régénération : MANA OVER METH (NZ) de Holly Beckham.

       Quand témoigner vous engage pour les autres et remporte ses victoires : TESTIMONY (NZ) d’Alice Lolohea.

           Et que la législation se trouve encore retardataire en matière de choix du genre en Australie dans THE DREAMLIFE OF GEORGIE  STONE de Maya Newell.

         Sans mésuser de l’impact réciproque entre films sélectionnés et esprit du festival et des festivaliers, il s’agirait bien d’interaction mais peut-être aussi de de symbiose.

       

Un article de  Monak

 

   Tous droits réservés à Monak & Julien Gué. Demandez l’autorisation des auteurs avant toute utilisation ou reproduction du texte ou des images sur Internet, dans la presse traditionnelle ou ailleurs.


vendredi 10 février 2023

20ème FIFO : question d'éthique


Panorama éthico-militant

 

            Avec la 13ème nuit de la Fiction Océanienne, 9 courts-métrages dresseraient-ils ensemble, en quelques 10 minutes chacun, une approche du rêve océanien et de la diversité des mentalités éparpillées dans ce vaste continent enclos, fluctuant et encore émergé du Pacifique ?


 Les fictions ne projettent pas d’espoir particulier et ne dispensent pas de meilleure impression sur la vague des documentaires sélectionnés pour la compétition .

 

Quand LA TRAITE (MILKED) prend un double sens...

              Seul l’impact des scandales dévoilés, de l’injustice dénoncée mobilisera une population océanienne de plus en plus exacerbée. Il paraît évident que les spectateurs du FIFO ne resteront pas indéfiniment inhibés.

         L’accumulation des aberrations décrites et récoltées dans chacun des pays concernés et participants actifs, voire militants de causes environnementales, sociétales, de droit élémentaire... viendra un jour amorcer ou soutenir la lutte pour le respect de l’intégrité humaine. L’égalité en est un exemple dans un État aussi stable que l’Australie... et pourtant !


Un rêve à dimension océanienne ?

          C’est alors que nous apprenons à travers les créations fictionnelles que la réalité se prend les grandes claques du rêve ou de l’impossible rêve. En Nouvelle-Zélande les policiers indigènes ne songent qu’à s’unir aux manifestants et à exiger de l’État, la restitution des terres spoliées: comme dans MALAMA PONO, WILLY BOY (de Scott.W, Kekama Amoa - Hawaï)

    Que l’Australien lambda se prend pour une sirène, inadaptée aux conditions déplorables de la modernité : ainsi que l’explore Chloé de Brito dans PINK REEF. Et que les légendes ancestrales abreuvent l’imaginaire hawaïen : comme dans la légende animée de SINA MA TINIRAU (de Vilsoni Hereniko), des Fidji à bien ailleurs encore...

      Que la nature volcanique de son île originelle est aussi insupportable que la surdité et l’aveuglement des générations actuelles : ainsi le montre INHERITANCE d’Erin Lau (Hawaï).

 

Quand le droit est bafoué... s’engager !

           Que l’exil reste une frustration sans nom, quand il perpétue l’errance anonyme : nous raconte Kaihu Kaiha pour la Polynésie française dans FIND WHERE I BELONG. Et que le rapprochement des cultures a encore un bien long chemin à parcourir avant d’y parvenir : LA NAISSANCE D’UN GUERRIER (de Gino Pitarch pour la France).

              Un imaginaire largement ouvert sur les changements de tous ordres, quand le réel, tel qu’il apparaît aussi dans les documentaires océaniens aussi, est truffé d’échecs, de malheurs, de voie sans issue !  !  !

        Ainsi, apparaît PERIANAYAKI de Bala Murali Shingade (Nouvelle-Zélande), Sri-lankaise immigrée dont la vie se réduit à un travail pénible sans autre loisir que la visite de son conjoint hospitalisé sans discontinuer depuis 2 ans... Solitude et enfermement, se vivent aussi de façon extrême pour ce jeune Australien, harcelé jusqu’au drame dans VICTIM (de Robin Summons).

       Laisserait pointer l’humour READY FORWARD de Jim Jost, car la mort est trop proche, qu’elle a déjà commis ses méfaits, sur ce couple de retraités finissant, qui n’a plus rien à attendre de la vie... excepté d’en faire le deuil.

L’égalité, le droit à l’image : un combat  !

           En conséquence, peu d’optimisme à tirer de cette 13ème NUIT DE LA FICTION FIFO... sinon à constater que le 20ème festival documentaire océanien ne laisserait entrevoir que de lointaines lueurs d’espoir.

 

Un semblant d’espoir ?

            C’est dans des documentaires australiens tirés d’archives familiales, tels que ABLAZE d’Alec Morgan et Tiriki Onus, que les Aborigènes se réapproprient leur identité, leur savoir-faire créatif et artistique  de réalisateur  (dont le grand-père Bill Onus et son cinéma des années 30), de leur histoire - souvent occultée, censurée ou confisquée -, de leur statut de "sous-homme ou d’esclaves enchaînés", de leur combat contre la ségrégation  (grève et "transhumance" de 1946 ) ou l’absence de statut juridique et l’obtention d’un semblant d’égalité en 1967 !  !   !


Un cinéma confisqué...

          Pour des tas de raisons dont la dimension du territoire australien, mais surtout pour des questions de domination coloniale, l’œuvre artistique (scénique, théâtrale, lyrique), la lutte socio-politique, non-médiatisées voire complètement censurées par les services de sécurité intérieure,  sont totalement gommées de la vie publique... pour entretenir un discours d’incapacité mentale des populations aborigènes...   

       Grâce aux chercheurs, aux historiens, aux mouvements sociaux populaires, aux mouvances politiques qui s’opposaient aux mesures coercitives des "Missions" (ou réserves religieuses) où les Aborigènes devaient être mis au pas, sans salaire, sans ration alimentaire constante, sans liberté, sans droits... 

         Tout semble être exhumé... et renaître 

 

«200ans pour que les Blancs considèrent les Aborigènes comme des humains»...


         Que ce soit a posteriori, reste problématique... Quand les nations se posent les vraies questions : celles qui ont assis leur puissance, celles qui les remettent en question. Ainsi, assiste-t-on à la découverte des "mensonges blancs dans le pays laitier"

        Avec le coproducteur Chris Huriwai, activiste autochtone maori, la réalisatrice Amy Taylor remet en cause la «dégradation environnementale» bien rodée par les «Géants» de la TRAITE ou MILKED de Nouvelle-Zélande...

 

Et si les victoires faisaient avancer...

        Malgré une sécheresse exceptionnelle gravissime aux Marquises, le baromètre reste au beau fixe... avec ce titre allécheur MOKU UTA (Rassembleur).  Raynald Mérienne transcrit dans son documentaire le combat d’un archipel polynésien qui parvient à reconstruire une unité culturelle, tronquée jadis par les interdits religieux d’une église prétentieuse.

      Car le combat d’une culture, c’est d’abord son dynamisme : son actif qui se renouvelle au jour le jour ; les discours sont inutiles s’ils ne fédèrent pas dans l’action.

      Chants, danses, anciens comme nouveaux, écrits, langue se régénèrent sur une analyse mais surtout une pratique assidue et sans faille. Ce qui lui permet d’évoluer et qu’elle ne meure pas de pétrification.

« écrire, sculpter, tatouer : une musique...»

       Qu’il s’agisse de végétal à travailler, de tatouage, d’écriture ou de sculpture :  Le geste de la transcription s’accompagne de rythme, de scansion... Son acte est un tout : à l’image du souffle vital. L’un n’opère pas sans l’autre, apprend-on de source sûre...

       Comment refuser alors de se plonger dans une culture dont la palpitation s’intériorise en même temps qu’elle se vit...

Une expérience à ne pas manquer.

       

Un article de  Monak

 

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jeudi 9 février 2023

20ème FIFO : question de droit


Le Droit et les colonisations

 

            Les festivités d’accueil achevées, les festivaliers réciproquement présentés, place aux émotions de l’écran, à ce va-et-vient entre obscurité des salles et plein feu des projecteurs sur les créateurs cinématographiques ou leur sujet d’enquête... aux dédales entre montage, questionnements et finalisation avec les réalisateurs.

 

        L’accent semble être mis cette année sur l’assise médiatique de la manifestation, son amplification, son impact, pour en rehausser l’écho : un regain de rituels éparpillés dans la communauté française du Pacifique, avec Wallis & Futuna, la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie, comme jamais auparavant. Kava partagé entre festivaliers participants et organisateurs, la cérémonie inaugurale n’a plus qu’à se déployer, comme ailleurs on déroule le tapis rouge. De même, le temps semble être majoré pour la dimension humaine, il aurait tendance à se dilater autour des diverses individualités porteuses d’un projet documentariste.  

 

Kava’ a à l’accueil...

             Les documentaires océaniens volent de leurs propres ailes, se forgent de plus belle leur propre concept et affichent l’originalité de leur esthétique. De plus en plus fouillé et épineux, leur propos ne ménage plus personne... et s’ils savent en maintenir les alternatives, histoire de donner leur place aux arguments même aléatoires, même fallacieux qui tombent d’eux-mêmes. La polémique est au goût du jour et présage d’un avenir douteux. L’atmosphère qui en ressort n’est pas des plus sereines. Le continent océanien continue à se réveiller et à s’affirmer.

         Parmi la quarantaine de films présentés au FIFO 2023, les treize en compétition insistent sur la prise de conscience des générations actuelles quant aux termes d’une véritable responsabilisation constructive. Comment honorer la coutume du pardon sans une vraie reconnaissance de culpabilité ?

        Dans ces deux derniers siècles et demi de colonisation du Pacifique, ni le Droit des peuples, ni la conscience confessionnelle n’ont épargné les petits, les enfants et les faibles. Les régimes politiques tout comme les Instances religieuses ont exercé sans limite leur hégémonie. Reste maintenant à reconstruire le futur sur les ruines de massacres multiples et essaimés partout... 

 

L'industrie Béton-Prison

           A BOY CALLED PIANO, de la réalisatrice et metteure en scène Nina Nawalowalo, présente l’avantage de raconter la vie d’un Samoan émigré en Nouvelle-Zélande, à la manière d’une enquête qui tient le spectateur en haleine jusqu’à la fin...  tout en structurant le film comme la mise en abyme du destin exceptionnel d’un homme « broyé », par le biais de séquences dramatisées qu’interprètent des acteurs.

 

              La forme du documentaire est intensément soignée : elle suit les pulsions internes de la vie prénatale, les souvenirs aqueux embryonnaires, ceux qui forgent votre sens artistique - le goût à la musique par exemple - à la prise de conscience des raisons de la crise et de ses conséquences salvatrices face à l’injustice du système colonial d’assimilation néo-zélandais. L’empire de la reine britannique se trouvant visé... Son, image, en appuient l’esthétique particulière.

Un destin à l’enfance  volée

           Elle s’exprime en se coulant au plus près tant par les images que par les paroles, les avis, les opinions des victimes : dont l’Enfant-Piano qui, de la « Haine » où le « système » l’a acculé, se réconcilie avec lui-même, avec sa valeur, son atout d’humain à part entière.

          Effectivement se révèlent petit à petit les conclusions de « La Commission Royale d’enquête sur les abus  causés par l’assistance de l’État » : tout comme pour la personne concernée - Fa’amoena John Luafutu - des milliers d’enfants autochtones ont été confisqués à leur famille pour être pris en charge par les services d’un « soi-disant Centre d’éducation », véritable camp disciplinaire imposant aux enfants tous les stades de la maltraitance mentale et physique.


Un enfant comme des milliers en Nouvelle-Zélande

              Un travail de titan pour réussir à débusquer une escroquerie d’État. L’histoire n’est pas si vieille : elle touche les générations des années 50... sacrifiées, dévoyées par des mesures coercitives. Il faudra attendre 1989 pour que la Convention Internationale des Droits de l’Enfant retienne le droit à la famille, aux loisirs, à la santé, à la protection des mineurs !  !  !


Le gag juridique de l'histoire

            Il n’est pas qu’au sein de l’empire britannique que se répandent les pires exactions, la France figure parmi les nations qui imposent le « faites ce que je dis » mais « ne faites pas ce que je fais ». WAAN YAAT : sur une terre de la République française défraie la chronique dans les années1980... Co-réalisé par Emmanuel Desbouiges et Dorothée Tromparent en Nouvelle-Calédonie, il reconstitue l’embuscade de 1984 où succombe une dizaine d’indépendantistes, s’appuie sur les archives du procès, et analyse « l’injustice de la justice » sous couvert de raison d’État.

 


Quand la violence reste impunie...

          Mutisme total, « durable » et bien gardé de la France, plutôt bavarde sur ses victoires légales et légitimées, le verdict acquittant les « prévenus », fauteurs d’embuscade meurtrière sous le verdict de : ...« légitime défense-préventive » ! ! ! Contradiction dans les termes mêmes : d’où leur non-sens.

         Ce qui fait doucement rigoler, de la niaiserie des magistrats, s’il ne fallait y déplorer des morts : l’embuscade étant définie depuis la nuit des temps comme « la tactique martiale préméditée dans laquelle des belligérants se dissimulent pour attaquer un ennemi par surprise ».

       Sans parler de la façon «chasse à courre» d’achever les blessés avec les chiens, ni des mutilations sexuelles infligées aux cadavres !


Un devoir de mémoire...

         Illégalité totale d’une parodie de justice qui cautionne les incapacités de la France à gérer au 20ème siècle les termes d’une « décolonisation annoncée » par De Gaulle pour préparer la fin de la Seconde Guerre Mondiale (avant 1945) !  !  !

      Quant aux conséquences pour la Nouvelle-Calédonie, une gestion chaotique avec davantage de pression, une mainmise sur les problèmes sociétaux, une injustice flagrante et encore plus de morts...

        Une histoire sans fin... 

Un article de  Monak

 

   Tous droits réservés à Monak & Julien Gué. Demandez l’autorisation des auteurs avant toute utilisation ou reproduction du texte ou des images sur Internet, dans la presse traditionnelle ou ailleurs.


dimanche 5 février 2023

20ème FIFO : Pacifiction...


"Pacifiction", moi j'adore ! 

 

                     Que "Pacifiction" - objet cinématographique non-identifié -conçu, réalisé à Tahiti par l’Espagnol Albert Serra , diffusé et sorti à Cannes en 2022 participe de ce nouveau FIFO 2023... procède d’une bienheureuse initiative ! Qu’il en ouvre la 20ème Session, sur un petit coup médiatique peu anodin me réjouit pleinement.

      Je raffole particulièrement de ce genre d’événements qui déstabilisent l’apathie générale, émoustillent le conformisme ambiant et flirtent l’inconvenance avec insolence.

         Généreusement ancrée dans un contexte surréaliste jusqu’au non-sens, cette politique-fiction s’introduit ouvertement dans l’espace du Festival International du Film-documentaire Océanien (FIFO) : c’est sciemment qu’il joue un rôle subversif dans la programmation. La sélection a toujours soulevé des problématiques océaniennes pointues : la nouvelle génération des fifoteurs demande des comptes et tacle le dialogue de sourds, entretenu depuis longtemps entre les instances de l’État français et les Terres émergées de Polynésie.

        Entre prérogatives sécuritaires et coercitives, abus de lois liberticides, générés par la crise du COVID, extravagances qui touchent la dette nucléaire et l’indemnisation des victimes collatérales... et autres manœuvres d’intimidation... l’aberration est à son comble. Quand la réalité socio-politique s’appuie sur la soi-diant innocuité des tirs nucléaires, 30 après le désastre sanitaire et écologique d’Hiroshima... il est temps d’ouvrir les festivités filmiques pour percer et éradiquer les mensonges d’État !


"Pacifiction", bande-annonce ...

         Merci donc à l’art cinématographique d’avoir dénoncé l’échec d’un régime politique dépassé. Les issues rationnelles verrouillées sous des prétextes hautement financiers «indéboulonnables», Albert Serra réalisateur concocte la fable de Pacifiction en poussant le bouchon jusqu’à l’absurde contre-vérité. Véritable acte de rébellion intensément jouissif ! 

       D’une logique implacable, le scénario propose la reprise des essais nucléaires : face au déni des gouvernements qui se sont succédé pendant plus de 50 ans ! ... Faute de solution compensatoire, sanitaire, environnementale, libre champ est ouvert à la radioactivité qui poursuit ses méfaits... et génère de nouvelles victimes dans le Pacifique !

 

Frondeur ou contestataire... 

       Ces dernières années où la culture cinématographique, dont les documentaires en particulier, se sont vu privés de leur espace de gestion et de diffusion, confisqués de toute forme de communication sous des prétextes sécuritaires alors que les délégations politiques ou militaires sillonnaient librement le pays, orchestrant leurs manœuvres (! ! !) , figureront dans le panel de la période la plus loufoque de notre 21ème siècle !

       Il est salutaire que les artistes créateurs aient eu l’audace de se positionner vis-à-vis d’une situation des plus occultées. Leur engagement figure parmi les actes de courage indéniables d’un début de siècle chaotique. 

Albert Serra, à cor & à cri...  

      Il fallait l’oser ! De même que « vouer un culte à deux richissimes icônes du capitalisme décomplexé quand lui s’épanouit depuis une paire de décennies, et en toute confidentialité, dans un artisanat pur et dur aux confins du cinéma expérimental, ce prince des épouvantails.»   

     Effectivement, Albert Serra n’est pas un réalisateur ordinaire. «Jusqu’au-boutiste», il ne craint aucune des hypothèses menées à terme, mêlant «sensualité et trash contemporain»

 

Un peu long ?

      Juste lui reprocher la durée du film, frôlant les 3 heures... Mais on ne peut que déplorer actuellement la tendance «longueurs inutiles» : justifieraient-elles le déplacement du public en salle ? l’envie de renouer avec l’ambiance cinéphile... les animations ou projections 3D avec lunettes spéciales...???

       Et comme le film dérange pour la teneur de ses propos et son réquisitoire libertaire, on attaque la prestation de Bruno Magimel plutôt que de l’encenser sur ses performances d’acteurs : ce qui paraîtrait bien légitime pour qui se revendique du métier !

       «Toute l'équipe a attrapé le Covid à un moment ou à un autre du tournage qui a duré 25 jours alors que Tahiti était en confinement total. Outre la pandémie à gérer, Benoît Magimel a dû se familiariser avec un tournage singulier»...  Le détail reste à découvrir  sous ce lien hypertexte...

       Pour nous, qui vivons à Tahiti, le personnage du «haussaire (haut-commissaire)», fait partie d’une faune improbable, de ces personnalités difficilement perméables... mais nommées pour plusieurs années. Le sort qui lui est imparti est intéressant à bien des égards : « haut fonctionnaire félin dans "Pacifiction", tout un programme...


Un jury anticonformiste 

        Parallèlement, le 20ème FIFO présente d’autres innovations non négligeables. Franco-congolais, Alain Mabanckou le Président du jury semblerait aussi conférer une teinte spéciale à cette 20ème session du FIFO.

          Autonome, engagé, la langue bien pendue et le courage de dire :  Alain Mabanckou ne  ménage pas ses prises de position :

         «Le 5 mai 2015, Alain Mabanckou remet le prix « Courage et la liberté d'expression » au nom du PEN American Center  à Charlie Hebdo.» Et Vlan! Un pavé dans la mare du conformisme peureux...

Alain Mabanckou...

      « En 2018, il refuse de participer au projet d'Emmanuel Macron de réflexion autour de la langue française et de la francophonie et s'adresse au président de la République dans une lettre ouverte où il appelle notamment à plus d'ouverture pour dépasser les origines coloniales du concept de francophonie et où il dénonce également l'indulgence de la francophonie « institutionnelle » envers « les régimes autocratiques, les élections truquées, le manque de liberté d’expression ».

    Avec la soirée inaugurale  du 06 février, «Noirs en France» , co-scénario d’Alain Mabanckou, réalisation d’Aurélia Perreau... donnera certainement le ton d’une parole qui, lasse de tergiverser, qui prend sa mesure ... et en pleine possession de ses engagements...

 

Jury 20ème FIFO... 

     Si le jury des Anciens établit une parité entre ses membres : la majorité compte parmi les lauréats primés depuis les années 2012. Les réalisateurs océaniens y figurent  en majorité : Rhys Graham (Australie), Anna Marbrook (Nouvelle-Zélande), Christine Della-Maggiora (Nouvelle-Callédonie), Olivier Pollet (Grande-Bretagne), Marie-Hélène Villierme (Polynésie française) et Lorenzo Marama (Tahiti, Journaliste et reporter à Polynésie la 1ère ) Du pain sur la planche avec  43 documentaires au programme, dont 13 en compétition et 12 hors compétition ; 9 courts-métrages documentaires et 9 de fiction.

 

Les 20 ans à la controverse ?

     Quant au «jury Génération 20 ans», à part un réalisateur et un passionné d’audiovisuel, ils sont presque tous étudiants.

     Sans parité exacte, histoire de candidature, le Jury Jeune regroupe 7 membres  : Luz Copie (en BTS), Timeri Lo (2ème année licence civilisation), Xenoha  Manarani (audiovisuel), Teariki Tekori, (licence langues), Amtsi Temanu (licence langue) Joseph Tetoe (Histoire-Géo), Tamaterai Trompette  (réalisateur).

      Avec l’inauguration du prix du jury jeunesse cette année, le FIFO s’assure une continuité dans la prise de conscience critique des mentalités océaniennes.

Jury Génération 20 ans

    S’ils sont de la même teneur que leurs aînés, ils nous assurent de «faire des vagues» Les «indésirables, laissés pour compte» en Métropole comme universellement ce sont « LES NOIRS».

      Une chance que la "Soirée du Président", Alain Mabanckou (du jury 2023) se soit appelée «NOIRS en FRANCE»...

      Une chance que le court-métrage d’Aurélia Perreau qui fait date en 2022, dans la gabegie raciste de l’Hexagone et de ses succursales, n’ait pas été émasculé à l’instar de «Dix Petits Nègres» d’Agatha Christie, devenu «Ils étaient 10», par excès d’euphémisme !


Je dis bien : «NOIRS EN FRANCE»

       Et pour rejoindre l’édito du FIFO, n’hésitant pas à citer l’écrivain Le Clézio, affirmons avec tous les artistes et documentaristes contemporains évoqués ici ou présents, ce genre de «profession de foi» :  «Pour moi, l’écriture est avant tout un moyen d’agir, une manière de diffuser des idées. Le sort que je réserve à mes personnages n’est guère enviable, parce que ce sont des indésirables, et mon objectif est de faire naître chez le lecteur un sentiment de révolte face à l’injustice de ce qui leur arrive», écrit J. M. G. Le Clézio.

 

Un article de  Monak

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