Publicité

Publicité
Le nouveau roman de de Monak à lire absolument

jeudi 17 mai 2012

La fête des mères

De la Grèce antique aux hypermarchés

Si la fête des mères est surtout, aujourd'hui, celle des commerçants, on en trouve les premières traces dans l'antiquité grecque. Petit retour en arrière...

Gâteau de la fête des mères au Royaume-Uni
Le dimanche 3 juin 2012, tous les enfants de France et de Navarre (DOM-TOM compris) célèbreront la fête des mères. Mais d’où peut bien venir cette tradition qui semble avoir toujours existé?

 

Les mamans déjà fêtées dans la Grèce antique

On trouve les toutes premières traces de célébration en l'honneur des mères dans la Grèce antique. Il s’agissait, lors des cérémonies printanières, de célébrer Rhéa, la Grande Mère de tous les dieux, et donc celle de Zeus. Ce culte particulier était rendu aux ides de Mars dans toute l’Asie mineure.

La déesse grecque Rhéa
Les Romains n’étaient pas en reste puisque, dès le Ve siècle avant Jésus-Christ, une fête religieuse (les matronalia) célébraient les matrones le 1er mars.
Ces coutumes ne résistèrent pas longtemps à la religion catholique.

 

Une tradition récente en Occident

Si, au XVe siècle, les Anglais fêtaient le Mothering Sunday au début du Carême, il faut attendre 1908, aux Etats-Unis, pour voir apparaître le fête des mères telle que nous la connaissons aujourd’hui.

L’institutrice américaine Anna Jarvis
Il s’agissait, pour l’institutrice Anna Jarvis, de rendre hommage à sa maman décédée le 12 mai 1905. En 1907, Anna Jarvis lança une campagne pour créer une fête des mères qui serait un événement officiel. La première fête de ce nom fut célébrée en 1908 et officialisée en 1914, lorsque le gouvernement américain approuva un texte de loi institutionnalisant la fête des mères, le second dimanche de mai. Depuis cette date, ce jour est férié aux Etats-Unis.

De nombreux pays comme la Belgique, le Danemark, la Finlande, l'Italie, la Turquie ou l'Australie suivent rapidement…

 

La France et la célébration des mères

Dans notre pays, le premier à s’être intéressé à la question est Napoléon 1er. En 1806, il instaura une fête prônant les vertus de la famille pour tenter de relancer la fécondité. La tentative fit un flop.

Il faut attendre 1918 pour voir la ville de Lyon instaurer la journée des mères. Il s’agissait alors de rendre hommage aux mères et aux épouses qui avaient perdu fils ou mari pendant la Première Guerre mondiale.

En 1920 est conçue une fête des mères de famille nombreuse et, finalement, le gouvernement français officialise une journée des mères, en 1929.

1941 : Le Maréchal Pétain instaure la fête des mères
La fête des mères ne fut inscrite dans notre calendrier national qu’en 1941. En effet, c’est cette année-là que le gouvernement de Vichy s’empara de l’idée et, dans le cadre de sa politique nataliste, inscrivit officiellement et définitivement la fête des mères au programme des festivités annuelles nationales.

 

La fête des mères est née

Après la Deuxième Guerre mondiale, la loi du 24 mai 1950, instaura définitivement la fête des mères.

Cette loi dispose que «la République française rend officiellement hommage chaque année aux mères françaises au cours d'une journée consacrée à la célébration de la "Fête des mères", organisée par le ministre chargé de la Santé avec le concours de l'UNAF* (article 1) ». Elle en fixe la date au dernier dimanche de mai sauf si cette date coïncide avec celle de la Pentecôte, auquel cas elle est repoussée au premier dimanche de juin (article 2). Enfin elle prévoit l'inscription des crédits nécessaires sur le budget du ministère (article 3).

Toutes ces dispositions ont été intégrées au Code de l'action sociale et des familles depuis sa création en 1956.

Pour finir, l'organisation de la fête est assignée au ministre chargé de la Famille depuis 2004.

 

Fête des mères ou fête des commerçants ?

A l’instar de nombreuses fêtes comme Noël, Pâques ou la Chandeleur, le monde du commerce n’a pas tardé à exploiter le filon de la fête des mères.

Si, à l’origine, il s’agissait pour les enfants de fabriquer un objet quelconque de leurs petites mains pour l’offrir à leur maman, les choses ont bien changées.

Bonne fête maman !
Le sens initial de cette journée qui visait à célébrer la fécondité s’est bel et bien perdu et, plusieurs semaines avant la date de la fête des mères, nous sommes envahis de publicités tentant de nous vendre tout et n’importe quoi, du bijou au robot de cuisine en passant par les fleurs et les produits de beauté…

Jusqu’aux pouvoirs publics eux-mêmes qui ne prennent même plus la peine de nous en rappeler la vocation première qui était, il ne faut pas l'oublier : «Mesdames continuez et faites beaucoup d'enfants!»

Lexique :
*UNAF : Union Nationale des Associations Familiales

Un article de Julien Gué

jeudi 3 mai 2012

Pirogues à voile miniatures

Les aumoa va'a de l'île de Taha'a
Il y a encore 20 ans, les pêcheurs de Tahaa se mesuraient dans des compétitions de pirogues à voile miniatures. Un seul d’entre eux était toujours vivant en 2011.

Le dernier des piroguiers
Marii Teriipaia est né le 1er décembre 1919 à Iripau, sur l’île de Taha’a. A 93 ans, il était l’un des derniers survivants de ces pêcheurs polynésiens qui pratiquaient leur métier sur ces pirogues à voile (les grandes !) qui ont totalement disparu des eaux polynésiennes.

Le blue marlin du record du monde (1968)
Avec son fils André,  Marii Teriipaia est, accessoirement, détenteur d'un historique record du monde toujours valide de pêche au gros : le 15 juin 1968 à Raiatea, ils avaient ramené un blue marlin de 1410 kg

Il était aussi le dernier des habitants de Tahaa qui, pour leurs loisirs, fabriquaient des pirogues à voiles miniatures afin de s’affronter dans des régates folles qui attiraient toute la population de l’île.

Marii Teriipaia à 91 ans, le dernier des piroguiers
Il était surtout le seul à avoir conservé intactes trois de ces pirogues miniatures qu’il avait lui-même fabriquées.

Marii Teriipaia est décédé chez lui, à Taha'a, le 1er décembre 2011.

Les pirogues miniatures de Taha'a
Fidèles reproductions des pirogues à voile utilisées pour la pêche au large, les Aumoa va’a (pirogues à voiles miniatures en Raromatai*) de Taha'a étaient réalisées à l’identique.

Elles pouvaient mesurer jusqu’à 1,50 mètre de longueur et leur coque principale était creusée dans un tronc de Purau (Hibiscus ti!iaceus). Le même arbre que leurs grandes sœurs pirogues de pêche à voile ou va’a à rames.

Balancier, gréement et accastillage étaient strictement identiques à ceux de leurs modèles. Une seule différence, la coque creusée dans le tronc, était refermée par un couvercle afin de la rendre étanche. En effet, il n’y avait personne à bord pour écoper !

Les Aumoa étaient munies d’un safran que le « capitaine » manœuvrait à l’aide d’un bâton en courant derrière sa pirogue pendant les compétitions.

La perceuse de Marii Teriipaia
Marii Teriipaia était l’un des meilleurs constructeurs de ces jouets merveilleux. Né d’un autre temps, il a toujours refusé de se servir d’outils électriques. Ainsi, aujourd’hui encore, que ce soit pour réparer ses pirogues, graver des nacres ou fabriquer ses hameçons pour la pêche au gros, il utilise toujours sa « perceuse » à ficelle (photo 3) !

Histoire des aumoa de Taha'a
Nul ne sait plus, aujourd’hui, qui inventa ce jeu ni à quelle époque. Une seule certitude : il a été inventé sur l’île de Tahaa et n’a jamais été pratiqué ailleurs. On n’en trouve effectivement aucune trace dans aucune autre île de Polynésie. Pas même à Raiatea qui est pourtant proche de seulement quelques kilomètres et enfermée dans le même lagon.

Ce que l’on sait par contre avec certitude, c’est que la dernière Tatauraa Aumoa (compétition de pirogues miniatures) s’est déroulée sur le platier de Patio en 1989.

La dernière course de aumoa à Patio, en 1989
Cette ultime course avait réuni quatre pirogues et avait été remportée par… Marii Teriipaia lui-même, alors âgé de 70 ans tout de même !

Les seules clichés qu’il m’a été possible de retrouver sont ceux qui illustrent cet article. Pourtant, il y en eut de faits. Il y eut également des images Super 8 qui furent tournées dans les années soixante par des touristes français, américains et japonais. Ainsi que des images vidéo dans les années 80. Mais que sont devenus tous ces documents ?

Si vous en possédez, je serais vraiment très heureux de pouvoir les publier ici même…


Les régates de aumoa
Les règles de ces compétions hors normes n’étaient évidemment pas écrites et étaient fort simple.

Afin que les « skippers » puissent courir derrière leur Aumoa, la course devait se dérouler sur un platier d’au moins 500 mètres de long dont il faisait un aller retour. La profondeur de l’eau devait permettre aux compétiteurs de courir suffisamment vite derrière leur pirogue. Ils ne devaient donc pas avoir d’eau plus haut que la mi-mollet.

En aucun cas, ils ne devaient toucher la coque de la pirogue avec leurs mains : seul le bâton leur permettait de modifier le réglage du safran et donc de diriger la pirogue.

Marii prépare son Aumoa avant une course en 1989
Lors des virements de bords, ils pouvaient changer les réglages de la voile, mais sans jamais pousser leur Aumoa.

Dans les années soixante dix, ces régates réunissaient parfois jusqu’à une vingtaine de compétiteurs et parfois plusieurs centaines de spectateurs.

Marii Teriipaia est le dernier survivant des participants à la dernière course de Patio en 1989. Il lui arrive encore parfois de mettre une de ses pirogues tant aimées à l’eau. Mais il n’est plus en mesure de les manœuvrer, alors c’est l’un de ses fils qui le fait à sa place.

Hélas, cela arrive de moins en moins souvent.

Et comme il me l’a dit lui-même : « Les jeunes, aujourd’hui, ils préfèrent boire de la bière et faire les fous en motos plutôt que de perpétuer nos traditions. C’est dommage : quand je ne serais plus là, plus personne ne sera plus capable de fabriquer une de ces pirogues… »

Marii Teriipaia et le dernier aumoa qu’il ait construit
Avec la disparition de Marii  Teriipaia, il est vraisemblable que s'est arrêtée aussi l’histoire des Aumoa, les pirogues à voile miniatures de l’île de Taha’a…

En effet si, peu avant la disparition de Marii, les élèves du Centre des Métiers d'Art de Papeete ont tenté de faire revivre ces merveilleux jouets, leurs réalisations étaient beaucoup plus petites que celles avec lesquelles jouaient les grands enfants de Taha'a et dont il restait trois exemplaires dans le fare de Marii lorsque nous nous étions rencontrés.

En guise d’hommage à Marii Teriipaia
Lorsque cet article a été publié pour la première fois, Marii Teriipaia était encore bien vivant. Il a baissé sa voile pour la dernière fois le 1er décembre 2011, laissant derrière lui une très nombreuse famille.

C’est pour eux, et pour que ne se perde jamais la mémoire de cet homme réellement hors du commun que j’ai décidé de publier ici l’intégralité de l’un des entretiens que j’avais eu avec lui dans sa maison à Taha’a. C’est la plus jeune de ses filles qui nous avait servi d’interprète. Et, comme vous pourrez le constater, le souvenir des aumoa était porteur d’émotions d’une intensité rare, au point de faire pleurer ce très vénérable vieillard.

Une heure d’entretien avec Marii Teriipaia

Lexique :
* Raromatai : nom de l’archipel, des habitants et de la langue des Îles-Sous-Le-Vent


Un article de Julien Gué