À la racine de l’histoire polynésienne
Sur la côte Est
de Raiatea, aux Îles-Sous-Le-Vent, se trouve le plus grand et le plus important
des marae de Polynésie française.
Âme de l’île de
Raiatea, au point kilométrique 31 de la côte Est, s’étale sur trois
hectares le site archéologique le plus important de tout le Pacifique Sud : le
marae Taputapuatea.
Le marae Taputapuatea vu du ciel |
Face à lui, ouvrant la porte de l’océan Pacifique, la passe
sacrée Te ava moa.
Connu pour être le berceau de la culture ma’ohi, le marae
Taputapuatea est le site archéologique le plus important de tout le Pacifique
Sud. Au-delà, c’est aussi un endroit mythique imprégné d’une intense
spiritualité et d’une longue et grande histoire.
La
beauté du marae Taputapuatea
Occupant le promontoire qui sépare la baie de Opoa de celle
de Hotopuu, le marae Taputapuatea est bel et bien le gardien de la passe sacrée
Te ava moa.
Face au marae, la passe sacrée Te ava moa |
Dallages de galets couvrant les immenses surfaces des
espaces rituels, imposantes dalles de corail et de pierres volcaniques dressées
en marquant les points les plus sacrés, murets parfaitement rectilignes
délimitant nettement ces espaces, c’est tout cela que Taputapuatea offre aux
regards des visiteurs éberlués.
Il se dégage de ces lieux le même genre de force étrange
qui, dans certaines cathédrales européennes, impose à ceux qui y pénètrent de
parler à voix basses.
Si les Fare Va’a (maison des pirogues), Fare Atua
(maison des dieux), Fare Ia Manaha (maison des trésors) et autres Fare
Tupapa’u (maison des morts) ont tous disparu, c’est qu’ils étaient bâtis
en matériaux légers traditionnels : poteaux en cocotier, cloisons végétales et
toitures en ni’au ou rau'oro (pandanus).
Le hangar à pirogues ou fare va'a |
Les Unu, grandes effigies en bois ornées de motifs
géométriques et de figures animales ou anthropomorphiques, ont bien sûr toutes
disparues. Ils furent pour la plupart détruits lors de l’évangélisation. Ceux
qui y échappèrent ne résistèrent pas aux outrages du temps et de l’humidité.
Sur le marae Taputapuatea, ils ont été re-sculptés et trônent de nouveau à
leurs places respectives.
Toutefois, nul ne sait plus aujourd’hui quelle était la
signification précise des Unu. Chacun peut donc choisir d’y voir ce
qu’il souhaite.
Le marae
Taputapuatea et l’histoire
La société polynésienne est une société de tradition orale,
il n’y a donc aucune trace écrite permettant de retrouver l’histoire réelle de
la Polynésie et du peuple ma’ohi. Sauf, peut-être, dans les archives
inaccessibles du Vatican et les écrits des premiers missionnaires…
La
« bible » des historiens de la Polynésie
Un seul ouvrage fait encore référence quant à l’histoire de
ce peuple, le célèbre Tahiti aux Temps anciens, de Teuira Henry.
Pour la petite fille du Pasteur Orsmond, Taputapuatea
serait le plus ancien des marae arii. Il est le plus important des
quatre marae Taputapuatea de Polynésie. Les trois autres se trouvant à Tahiti
et Moorea.
Toutefois, le marae Taputapuatea n’a pas toujours été un marae
arii (marae international). A l’origine il n’aurait été qu’un marae
Mataeinaa (marae national dans la classification de Teuira Henry) du nom de
Tini-Rau-Nui-Mata-Te-Papa-O-Feoro (Myriades fécondes qui gravèrent les roches
de Feoro), avant la naissance de Oro à Opoa.
Ce n’est qu’avec le temps et le peuplement des archipels
polynésiens par les Ma’ohi que Raiatea devint l’Île Sacrée et le marae
Taputapuatea le centre culturel et religieux de l’ensemble des îles polynésiennes.
Vue d'ensemble du marae Taputapuatea |
En effet les prêtres et les chefs guerriers s'y rendaient
périodiquement, venus de tous les coins du Pacifique : Taha'a, Bora Bora,
Maupiti, Rarotonga, Rotuma (Fidji), Nouvelle-Zélande… Ces pays formaient à
l’époque une grande alliance politique, religieuse et économique.
Comment cela s’est-il passé, il est aujourd’hui bien
difficile de le retracer avec certitude…
Le marae Taputapuatea et la
légende
Il existe de très nombreuses légendes concernant ce marae.
Celle qui revient le plus souvent, et qui est rapportée dans Tahiti aux
Temps anciens, est la suivante.
Le marae Taputapuateaest bâti autour de huit pierres
dressées principales représentant les huit rois qui auraient régné sur le pays.
De nombreuses cérémonies ont lieu, de nos jours, sur ce marae |
Selon la légende, lorsque Oro, le roi de la guerre, naquit
à Opoa, son père lui donna pour demeure Opoa et le marae Feoro. Oro devint
alors très puissant et fut reconnu par les habitants de Raiatea et des autres
îles comme le dieu suprême.
D'autres récits font remonter l'origine du marae d'Opoa à
une période relativement récente (17ème ou 18ème siècle)
à partir d'une pierre issue d'un autre marae (marae Farerua de Bora
Bora, selon Marau ou marae Vaeara'i de Raiatea, selon le Professeur
Emory).
L’avenir
du marae Taputapuatea
Aujourd’hui, le marae Taputapuatea est l’un des sites
historiques les plus réputés et les plus visités de Polynésie française.
Il a été remarquablement restauré et est parfaitement
entretenu, ce qui est très rare en Polynésie.
Petite visite guidée
du marae Taputapuatea
Toutefois, afin de le mettre définitivement à l’abri de
toute dégradation, y compris celle d’une urbanisation plus ou moins sauvage de
son environnement immédiat, un Comité
de pilotage, patrimoine mondial de l’Unesco a été créé en septembre 2009.
Ce comité avait pour objectif de faire classer au patrimoine
mondial de l’Unesco « les îles Marquises et le complexe sacré Te Pô
incluant le marae Taputapuatea de Raiatea ». Pour ce qui concerne le marae
Taputapuatea, c’est
chose faite depuis le 9 juillet 2017. Si le dossier des Marquises est, lui,
encore à l’étude, il est en très bonne voie et ceux qui le défendent (avec
à leur tête Pascal Herel Hatuuku) sont très optimistes quant à l’issue de cette
démarche.
Un article de Julien Gué
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