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vendredi 12 octobre 2012

Angelin Preljocaj, impressionnante rencontre

Un chorégraphe à fleur de peau

Moment magique, inoubliable, présence extraordinaire, pétillante de vie, de chaleur humaine et de maestria. Dithyrambique je vais être mais profondément sincère.

Pas de photos, pas de vidéo… mais tout est là, ancré dans ma chair, ma conscience, mon expérience d’interprète en danse contemporaine. Et rien ne pourra me faire renier cette chance de témoin pour cette répétition publique dans les studios du Pavillon Noir d’Aix-en-Provence.

Deux sur le plateau, « deux hommes », précise Angelin Preljocaj sourire malicieux en guise de bienvenue à l’assistance et de présentation : Fabricio et Baptiste, ses « célestes Mustangs ».

Angelin Preljocaj
Dans le silence acquis par ce clin d’œil, un brin de voix qui ne se départira pas de son calme et de sa chaleur, tout du long de la répète.

Au festin de cet été indien, l’étincelle de la complicité  fulgure à plein entre chorégraphe et le duo, d’un niveau et d’un répondant incontestables : action/réaction au quart de tour.

Comme pour s’excuser de ses exigences, Preljocaj nous commente ses arrêts, ses relances, se reproche sa tyrannie, lançant un bon gros mot d’autodérision pour détendre la tension. « Car ce n’est pas facile pour eux de se commettre en apprentissage sous vos yeux ».

Centaures, images en gémellité
Rien d’hautain, tout en douceur, l’empathie au cœur étaie son duo de Centaures, galopant et piaffant sous l’effort. Et le miracle opère. De la neutralité initiale ils passent à une prise en charge assumée. La phrase gestuelle se délie, se tonifie, se contraste, flashe en accents. Le mouvement prend du caractère. La beauté affleure.

Avec toute son humilité de star palpitante à l’écoute des corps, de son pupitreur Youri et de ses partenaires, en courtes pauses ponctuant l’effort, il se réjouit du talent des danseurs et s’émerveille, comme la toute première fois, à la musique de Györgi Ligeti qui a inspiré ce ballet.

Avec tout autant d’humilité reconnaît-il que puiser dans un répertoire déjà daté n’est pas régresser. Mais je le soupçonne, avec Les Centaures (1998), tiré de son ballet-phare, de ne pas se lasser de sa symbiose avec La Peau du monde.

    
 Funambule du rêve
Cool dans ses godasses, Angelin ne se contente pas de visualiser et de diriger, il démontre. Et là ! Respiration coupée, la salle se suspend en apnée.


Preljocaj en solo dans "Le Funambule" de Genet
Tout en vibration, en sensibilité : dans ce décor nu et sans projecteurs, il nous transporte déjà dans les aubes radieuses du spectacle.

En « impulsion d’archet » ou d’archer (!?!), il est à la fois l’un et l’autre de ses danseurs, de ces « hommes-chevaux », de ce mythe « biomécanique » : tout en « gémellité ».

«  Lorsqu’il n’y aura plus rien
Lorsqu’il ne restera plus que le désert, le sable, et le vent
Lorsqu’on aura défroqué le monde
Soigneusement rasé la pilosité terrestre
Quand la vallée nue comme un ventre
Sera fendue par le soleil de midi et la gelée de minuit
Quand la Nature aura perdu sa nature
Que la terre comme une boule de cuir
Tannée, usée, séchant au fil du temps
Sera le dernier territoire des cavaliers
Les hommes debout entre chien et dieu
N’auront de cesse de trouver l’air qui leur manque
Et leurs poumons sauront trier le sable
Inévitablement mêlé à l’air brûlant
L’eau sera l’or, l’or sera la boue
Et les cavaliers aux chevaux morts
Péripatéticiens fatals aux rêves de galops
Seront des derniers à penser le monde
Il ne leur restera alors qu’à tout réinventer
Grâce au vide, au silence, au désert
Et profiter de cette nudité extrême
Pour se coucher au sol contre la peau du monde  »
                                                                                                                  Les Cavaliers
                                                                                                                  Angelin Preljocaj




                             La même sensibilité dans les mots

Net, rapide, précis, à bloc, fulgurant. L’émotion jusqu’au bout des figures. La perfection au…

Ce n’est pas pour nous surprendre qu’il s’est lancé dans un solo, il y a moins de 3 ans : Le Funambule où il réalise chorégraphiquement, comme une peau qu’il endosse, le texte qui l’a toujours obsédé : mêlant monologue et mouvement.

Dans la veine de l’humour preljocajien et afin de réjouir nos amis polynésiens, son Haka de danseuses (2007), pour recevoir les All Blacks.


Haka pour talons-hauts
Un voyage dans la peau de l’autre…



Un article de Monak


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