Au cœur des montagnes de Taha’a
C'est
sur l'île de Taha'a, en Polynésie française, qu'est produite la meilleure
vanille du monde. Histoire d'une gousse de "Vanilla tahitensis".
La
vanille dite « de Tahiti » est cultivée dans de nombreuses îles
de Polynésie française. Toutefois, une seule d’entre elles a été surnommée
« l’île vanille ». Il s’agit de Taha’a,
dans l’archipel
de la Société.
La merveilleuses Taha'a vue de Raiatea |
Il
est vrai que la vanille produite à Taha’a offre des qualités gustatives que
l’on ne retrouve dans aucune autre production de Polynésie. A cela plusieurs
explications liées à un climat très particulier, une qualité des terrains spécifique,
mais aussi et surtout un savoir-faire et une méthode de production
particulièrement élaborés et soigneusement préservés.
La vanille est d'abord une orchidée |
Toutefois,
avant de s’intéresser au processus de production de la vanille, il est bon de savoir
qu’il existe deux méthodes de culture de l’orchidée : l’une dite traditionnelle
et l’autre, relevant d’une démarche plus industrielle, dite culture sous
ombrière.
Une ombrière à Taha'a |
La
culture sous ombrière produit une gousse de vanille de bien moins bonne qualité
que la culture traditionnelle pour des raisons que nous aborderons plus loin.
A flanc de montagne, une vanilleraie traditionnelle |
Hélas
pour le consommateur, il n’existe pas de label de qualité permettant de
reconnaître une vanille de Taha’a produite de l’une ou l’autre manière. Mais
les plus grands chefs du monde ne s’y trompent pas, eux, et viennent se servir
sur place directement chez certains producteurs.
La
vanille, une orchidée parasite
"Vanilla
tahitensis" est une orchidée parasite grimpante. En Polynésie, elle se
développe à mi-hauteur des montagnes, à l’abri de la canopée, enroulant ses
longues lianes autour des arbres lui offrant leurs troncs nus en guise de
tuteur.
La vanille est bien une orchidée parasite |
Et
c’est là que se fait toute la différence entre la culture naturelle et la
culture sous ombrière.
En
milieu naturel, "Vanilla tahitensis" s’imprègne, en s’en nourrissant,
de la matière même de l’arbre sur lequel elle se développe. Cette source
particulière d’aliments influant directement sur le parfum et le goût de ses
gousses. Le reste de la nourriture de l’orchidée lui venant de ses racines
enfouies dans l’humus de la forêt tropicale.
Un plant de vanille en milieu naturel à Taha’a |
Pour
la vanille cultivée sous ombrière, le tuteur n’est rien d’autre qu’un poteau en
ciment. Aucune source alimentaire à en attendre donc. D’autre part, il s’agit
de cultures hydroponiques hors sol. Le parfum de la gousse produite s’en trouve
donc considérablement amoindri.
C’est
pour ces raisons que nous nous intéresserons à la production de vanille en
milieu naturel.
Du
plant à la gousse de vanille
Aujourd’hui,
à Taha’a, les vanilliculteurs qui travaillent en milieu naturel ont réussi à
faire en sorte de développer leurs plantations dans des zones beaucoup plus
basses des flancs de montagne. Cette adaptation de la vanille à des zones de
vie moins élevées facilite grandement le travail des producteurs.
La fécondation de la vanille se fait à la main… |
En
effet, lorsque les plantes fleurissent, pour qu’elles produisent la délicieuse
gousse noire, il faut féconder chaque fleur à la main, une par une… Ne plus
avoir à faire, chaque jour, une longue ascension avant d’accomplir ce travail,
puis une longue descente dans la forêt tropicale, est un gain de temps et
d’énergie énorme.
Une
fois cet épuisant et fastidieux travail terminé, il faut laisser la vanille
produire son fruit, tout en entretenant la plantation afin qu’elle ne soit pas
envahie, et donc étouffée, par l’exubérante végétation tropicale.
Les gousses de vanille prêtes pour la récoltes |
Lorsque
la gousse est enfin arrivée à maturité, mais juste avant qu’elle ne s’ouvre
naturellement pour libérer les graines qu’elles contient, il faut alors la
cueillir délicatement afin de ne pas l’abîmer.
Le
séchage des gousses de vanille
Cette
étape de la transformation des gousses de vanille est cruciale car c’est d’elle
que dépend en grande partie la qualité finale de la vanille.
Etalées
au soleil sur de grandes claies très aérées, c’est au cours de cette délicate
opération que les gousses vont acquérir cette couleur noire si caractéristique.
C’est aussi lors de ce processus que le parfum va se révéler.
Sous haute surveillance, la vanille sèche au soleil de Taha'a… |
L’opération
nécessite une surveillance constante car, au moindre passage nuageux, les
gousses doivent être mises à l’abri dans des caisses isothermes afin qu’elles
ne refroidissent pas. Puis, ressorties au soleil, dès que celui-ci est revenu.
La nuit, comme à chaque passage nuageux, la vanille se met à l’abri |
Une
fois les gousses bien noires, vient un moment crucial pour l’obtention d’une
vanille offrant le meilleur de son parfum : le massage.
Le
massage de la vanille
Cette
délicate opération du massage de la vanille se déroule de la manière suivante :
une a une, chacune des gousses est malaxée avec douceur sur toute sa longueur
dans le but d’écraser les graines qui se trouvent à l’intérieur, libérant ainsi
l’essentiel de l’arôme du fruit.
Les gousses prête pour le massage |
Si
l’opération est fastidieuse, elle est aussi particulièrement délicate car il ne
faut en aucun cas percer la précieuse enveloppe végétale.
Le
massage terminé, les gousses sont triées en fonction de leur longueur, de leur
grosseur et de leur état général.
La
vanille, or noir de la Polynésie française
Si
la vanille naturelle de Taha’a est considérée, en gastronomie, comme le summum
de la qualité mondiale, elle est utilisée dans bien d’autres domaines et sous
bien des formes différentes.
La vanille de Taha’a et ses nombreux produits dérivés |
En
dehors de la gousse, que tout le monde connaît, on en fait également un extrait
sous forme d’huile, on la fait macérer dans du rhum pour le parfumer, on en
tire une essence utilisée en parfumerie et en cosmétique et, beaucoup moins connue,
une poudre utilisée en cuisine.
Aujourd’hui,
l’île de Taha’a produit l’essentiel de la vanille dite de Tahiti. Il ne reste
plus donc aux vanilliculteurs de l’île qu’à créer et faire reconnaître un label
garantissant l’origine et le mode de production de leur vanille,
incontestablement la meilleure du monde…
Tous mes
remerciements à :
« La Vallée
de la Vanille » de Bryan le Danois et Moeata pour la gentillesse de leur
accueil, la clarté de leurs explications et la qualité de leur vanille ;
Ainsi qu’à mes
amis de la pension « Au phil du temps » pour leur accueil et leur
disponibilité…
Un article de Julien Gué
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