Une menace pour tout le Pacifique Sud
Seize ans après le dernier essai nucléaire à Moruroa,
les retombées de la bombe française menacent de plus en plus la Polynésie
française.
Si le dernier tir nucléaire français en Polynésie
française a été effectué en 1995, les premières retombées de trente
années d'expérimentation dans le Pacifique Sud commencent tout juste à
apparaître, mais du bout des lèvres, dans les discours officiels.
Ainsi le 27 janvier 2011, à Tahiti, le délégué du
ministre de la Défense français, Marcel Jurien de La Gravière, admet au journal
télévisé "qu’un effondrement d’une partie de l’atoll de Moruroa n’est pas
à exclure". Il annonce que cela risque de provoquer une vague de 20 mètres
de hauteur.
Un essai nucléaire aérien français à Moruroa |
Rappelons que la
France a réalisé 179 tirs nucléaires aériens et souterrains dans ce
petit atoll de
l'archipel des Tuamotu, non sans en avoir, au préalable et sans lui
demander son avis, déporté purement et simplement la population.
La bombe politique de 2011
Si l'évangélisation du Pacifique Sud
porte la lourde responsabilité d'une acculturation profonde et irréversible de
l'ensemble des peuples polynésiens, c'est bel et bien l'Église
protestante Ma'ohi qui, la première, s'est levée pour protester contre les
essais nucléaires français en Polynésie et qui, en 2001, enfanta l'association
Moruroa e Tatou, seul organisme à se battre contre l'État pour faire
reconnaître les droits des Polynésiens face aux conséquences de ces essais.
Le 3 février 2011, la Conférence des églises du
Pacifique (l’organisation œcuménique régionale), qui réunit les églises
chrétiennes de toute la région, apporte son soutien à
l’association Moruroa e tatou et aux habitants de Tureia suite aux
dernières révélations de Julien de La Gravière sur l’effondrement de Moruroa.
La Conférence des églises du Pacifique, qui condamne
les essais nucléaires de toute nature et l’utilisation de l’énergie nucléaire
dans la région du Pacifique, invite le gouvernement français à
"reconnaître sans aucune réserve les radiations nucléaires et la pollution
de l'océan Pacifique comme une conséquence directe de l'effondrement de
l'atoll".
En 1980, Henri Hiro manifestait contre le nucléaire en Polynésie |
En réalité, la reconnaissance officielle par l'Etat
français des graves inquiétudes que suscite l'évolution géologique de l'atoll
de Moruroa fait suite à un
rapport du Commissariat à l'énergie atomique (CEA) en date du 10 janvier 2011.
Ce rapport explique très clairement que l'atoll est
bel et bien en train de s'effondrer et que la première des conséquences de cet
effondrement sera un tsunami de grande ampleur.
Il est intéressant de noter que ce risque majeur avait
déjà été évoqué dans un autre rapport officiel, resté sans suite celui-là, en
1997 !
Mais si la France reconnait aujourd'hui, du bout des
lèvres seulement, un danger réel, c'est uniquement sous la pression de Moruroa
et Tatou et de la Conférence des Églises.
L'atoll de Tureia condamné ?
Situé à une centaine de kilomètres au nord de Moruroa,
Tureia est directement et immédiatement menacé par cette catastrophe annoncée.
Pour 8 km² de terres émergées, Tureia compte 318
habitants permanents.
Si l'on s'en tient aux éléments annoncés par le
rapport du CEA, la vague ne submergerait que les terres situées en-dessous de
la cote 3 mètres. Hélas : il est bien rare que l'altitude maximum d'un atoll
dépasse les 3 à 5 mètres.
La carte du risque de tsunami pour l'atoll de Tureia |
D'autre part, et de cela le rapport ne parle pas : une
fois la vague passée, toutes les terres ayant été submergées deviennent
impropres à toutes cultures durant de nombreuses années en raison du sel
déposé. Il en va de même pour les quelques réserves d'eau douce naturelles qui,
même si elles sont impropres à la consommation humaine, sont vitales pour
l'arrosage des cultures vivrières.
Que vont devenir ces 318 personnes ? Où vont-elles
aller vivre ? Comment et par qui seront-elles indemnisées ? Ni le gouvernement
français ni le gouvernement polynésien ne répondent à cette question. Questions
pourtant déjà posée par le rapport de 1997 et sans cesse martelées depuis par
l'association Moruroa e Tatou.
Et les éléments radioactifs ?
Donc, le socle de l'atoll de Moruroa est en train de
s'effondrer, l'état français lui-même en convient. Il va y avoir un tsunami,
dont acte. Il reste un point de détail que le rapport déjà cité ne soulève pas
mais qui, pourtant, est générateur de bien plus d'inquiétudes qu'une petite
vaguelette de 20 mètres de haut.
Un champignon nucléaire sur Moruroa |
Puisque Moruroa s'effondre sur elle-même, qui aujourd'hui
peut garantir que les matières hautement radioactives qui sont scellées dans le
sous-sol de l'atoll ne vont pas être libérées à l'occasion d'une fissure, voire
de l'éclatement de leurs gangues de protection ?
Une manifestation anti nucléaire au Japon |
Cette question là inquiète de plus en plus l'ensemble
de la population polynésienne. Et bien au-delà toutes les populations du
Pacifique Sud, Australie et Nouvelle-Zélande comprises, car le régime des
alizés ne changera pas ses trajectoires habituelles sur la simple demande des
autorités françaises. Souvenez-vous du nuage de Tchernobyl...
Le silence n'est plus de mise
Il est grand temps que les autorités françaises lèvent
enfin, comme le réclame depuis toujours Moruroa e Tatou, le secret-défense qui
couvre encore tous les éléments relatifs au Centre d'expérimentation du
Pacifique (CEP). Secret-défense qui a été en partie levé pour ce qui concerne
les dossiers médicaux des anciens travailleurs des sites d'expérimentation.
Mais la loi d’indemnisation est tellement restrictive qu’à ce jour aucun des
anciens Polynésiens de Moruroa n’a eu gain de cause…
Moruroa, le 2 juillet 1966 |
Pour obtenir enfin toute la lumière sur ces essais
nucléaires, leurs conséquences, et pour
que les dirigeants de la France comme de la Polynésie assument enfin leurs
responsabilités face à ces désastres annoncés, l'Association Moruroa
e Tatou se bat au qotidien. Hélas sans grand succès.
Lire également l'excellent article du Figaro/Sciences :
Un article de Julien Gué
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la presse traditionnelle.
J'ai beaucoup apprécié de lire vos commentaires.Nonbreux ceux qui ont eu le cancer et que la france a oublié de les aider. Aucune indemnité pour les travailleurs qui ont travail a moruroa. Imagine ses paumotu qui travaillaient sur le site et qui ne comprenaient rien de ce qui se passe. La france oublie lorsque les choses reste a placard. Merci mes les personnes que j'ai connu son sous terre.
RépondreSupprimerMa grand mère est morte à cause du cancer causé par les essais nucléaire.. Je ne l'ai vu qu'une seule fois dans ma vie quand j'avais 5 ans, j'habite en métropole et tout ça me révolte. Quand je vois des métropolitains qui vont s'installer en Polynésie ça me dégoûte, ils ne savent rien sur notre culture, sur ce que ces frani ont fait, la France me fait vomir chaque jour que je passe ici. Vivement le retour au fenua.
SupprimerJ'avais 5 ans en 1960, et je vis en Polynésie depuis 2000. J'aime profondément ce pays et les Polynésiens. Pour autant, je ne me sens en rien responsable du fait nucléaire. Cher(e) anonyme : il ne faut pas tout mélanger...
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