Océanie, le melting pot
La conférence de presse
inaugurale annonce la couleur de ce 17ème FIFO : celle du
"Continent bleu" ainsi que le nomme Heremoana Maamaatuaiahutapu, ministre de la culture. Le ton est
plaisant et sans protocole : les "travailleurs de la mer"
océanienne forment déjà une équipe soudée, contente de se retrouver…
organisateurs comme membres du jury.
À l’évidence les préalables sont déjà posés et mettent d’accord tout le
monde, documentaristes et initiateurs de l’événement : Miriama Bono
souligne « l’implication » de chacun, spectateurs inclus ;
Wallès Kotra « la restructuration de l’Océanie autrement » ; et
le président du jury vient prendre un bain « d’innocence ».
Du Ministre de la Culture au Président du Jury FIFO |
Déjà, dans les documentaires hors
compétition, se profile l’image du modèle civilisationnel : Vanuatu : Troc, coutumes et dent de
cochon de Nina Barbier nous transpose vers un mode de
vie qui jongle, non sans gaieté, avec l’idée du paradis. Une société à deux
vitesses où une forme de communautarisme serait tournée vers l’exclusivement
humain. Tiens ! il semblerait même que le concept de concurrence et de thésaurisation
en soient exclues ! La forme en est alerte, les personnalités fringantes
et allègres, de la verve à revendre… Et l’éternelle question en Océanie de la
longévité des systèmes : qu’ils soit originels ou implantés…
Vanuatu, un modèle océanien ? |
Revenons à quelques figures de notre jury. Là
aussi, il y aurait matière à documentaire ! Bien sûr, je galèje. Mais qui
sait ? Un jury insularisé depuis la création du FIFO sur l’une des îles
aux très modestes dimensions, à 85% océanien, à 85% masculin, et dont le
président vient des antipodes, ça vaut le documentaire…
Du Sud pacifique...
Pour en finir avec les membres exclusivement océaniens,
saluons d’abord la Néo-zélandaise originaire de Samoa, Lisa Taouma :
écrivaine, scénariste, réalisatrice et productrice, fondatrice de la structure
inter-océanienne Tagata Pacifika, son objectif déclaré est de tisser des liens créatifs forts entre les
cinéastes des îles les plus éloignées de la région.
Les thèmes de ses productions s’inscrivent dans la réalité, le vécu
contemporain. Ils scrutent le quotidien et sont inépuisables. Le passé n’est
que tremplin à rappropriation moderne. Un défi qui touche les jeunes générations
et qu’elle ne cesse de soutenir.
Lisa Tauma… les liens tissés… |
Elle représente
trois documentaires inscrits dans la section "Fenêtre-sur-Courts" de cette année dont l’une des réalisatrices
Tuki Laumea s’est penchée sur la tradition des ‘Arioi tahitiens dans Tales of
Taonga ‘Arioi… dont l’une des
héritières spirituelles, la Tahitienne Hinatea Colombani a créé un Centre culturel à Papara.
La rencontre n’était pas fortuite, car en Nouvelle-Zélande, comme dans d’autres
îles, une tradition d’acteurs-baladins existait aussi aux temps anciens.
Divertisseurs et messagers, ils n’étaient pas structurés en caste comme à
Tahiti, m’apprend Lisa Taouma.
Important que le
triangle polynésien soit connecté artistiquement et que le patrimoine ancestral
puisse être revivifié. Car les ‘Arioi représentent « un monde précieux, un
vrai trésor (Taonga) » de fantaisie et d’invention pour la perpétuation
des légendes oubliées et le dynamisme des acteurs de demain…
... à l'ouest
Le réalisateur australien Paul Damien Williams,
implanté dans le milieu aborigène, laisse battre sa sensibilité au rythme des
musiques autochtones ou mixtes. Lauréat du FIFO en 2019 pour son documentaire Gurrumul, il est heureux de retrouver
Tahiti et d’y prendre une part active dans le jury. Une autre façon de sentir
le pouls océanien.
Sa fonction de chef du Département Documentaire à
Screenwest et de conseiller ne l’empêche pas de mener d’autres projets
cinématographiques en parallèle… Dans ses tiroirs, une histoire dans
l’histoire… Il serait tenté par le fictionnel, ce que l’avenir confirmera ou
non.
Paul Damien Williams… un docu-conseil |
Que les candidats
au palmarès FIFO se rassurent, son rôle de membre du jury, il le ressent comme
un moment où il se met à l’unisson du feeling des réalisateurs, de l’œuvre, de
l’âme d’un peuple.
... et à l'extrême ouest
Au-delà des continents, de l’autre côté de l’Océan
atlantique, la voix du Président du jury, réalisateur de fictions inscrites
dans ces deux derniers siècles : Eric Barbier. Heureux de rencontrer les
fondateurs du FIFO, y trouve l’occasion exceptionnelle de découvrir une région,
des mentalités totalement inconnues dans la réalité de son vécu. Découvrir en
accomplissant une tâche lui semble idéal.
Sans a priori, il est curieux de faire connaissance
avec la manière dont les Océaniens racontent leurs histoires… Il va
apprendre : et il compte bien
explorer ce monde inconnu par le biais du documentaire. Il apprécie, vu
la composition du jury, que les débats puissent être menés d’un point de vue
professionnel. En Candide qu’il se définit, il ne va pas se poser en chef, au
contraire, il attend des membres du jury qu’ils lui ouvrent la porte de leur
monde
Eric Barbier… avant immersion |
Et si « on
voulait coloniser le monde », à la suite de Wallès Kotra, détenteur de la
palme des projets les plus audacieux pour l’Océanie dont celui de se faire
entendre ailleurs ?…
Un article
de Monak et Julien
Gué
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