Terminus ferroviaire de la ligne phosphate
C'est en 1904 que le destin de Makatea
bascule avec la confirmation d'un gisement de l'un des phosphates les plus purs
du monde.
Les
premières rumeurs faisant état de la présence de phosphate sur l’île de Makatea
remontent à 1884. Mais c’est le capitaine Bonnet, en 1890, qui, le premier, y
signale officiellement la présence de ce précieux engrais.
Le village de Temao à Makatea en 1910
Il
faut toutefois attendre 1904 pour que le professeur Agassiz ramène à Papeete des
échantillons pour analyse. La confirmation d’une possible et valable
exploitation d’un phosphate tricalcite d’une teneur de 80 % à 85 % de minerai
pur, l’une des plus élevée au monde, est enfin donnée.
Dès
lors, le sort de l’île de Makatea est scellé.
Naissance
d’une aventure industrielle hors normes
Dès
1905 arrive le chef de travaux public Touzé. En trois brèves années, il va
changer fondamentalement le cours des choses.
Le Fare du directeur de la mine
En
collaboration avec Maître Goupil, notaire influent de l’époque, il prend
immédiatement contact avec la "Pacific Phosphate Company" qui
exploite les gisements de Nauru et de l’océan Indien.
Et
en 1907, avec la famille Goupil d’une part et la "Pacific Phosphate de
Nauru" d’autre part, il crée la "Société française des îles du
Pacifique".
Avant le train, le transport du minerai par brouettes
Dernière
étape administrative et juridique, le 4 décembre 1908, naît la toute nouvelle
"Compagnie française des phosphates de l’Océanie", la CFPO, société
qui compte 52 actionnaires. Aussitôt M. Touzé abandonne son poste de
fonctionnaire pour prendre la direction de la société.
Phosphates,
environnement et patrimoine culturel
Si
le respect de l’environnement et des sites archéologiques est signalé dans les
écrits officiels, malheureusement, l’archéologie, à cette époque, n’en est qu’à
ses balbutiements et l’extraction du phosphate est prioritaire. Donc, ni
fouilles, ni étude...
La grotte funéraire de la princesse espagnole
Heureusement,
les grottes funéraires d’époque pré-européenne se situaient souvent hors
d’atteinte. La plupart d’entre elles échapperont donc à la destruction. En
1930, on recense l’existence de huit marae. Seul celui de "Ra Inpu"
est préservé.
Quant
aux nombreuses cavernes contenant de limpides nappes d’eau qui auraient pu
satisfaire une population assez importante, elles ne serviront que tout au
début au ravitaillement des nouveaux arrivants. Ensuite, l’exploitation sera
toujours prioritaire.
L’eau douce et cristalline de la grotte Vairoa
La
nappe phréatique ne sera atteinte qu’en 1933 et ne fournira jamais plus de 150
m3 d’eau par jour. L’approvisionnement se fera donc par des citernes de
récupération et par voie maritime.
Phosphates
et retombées humaines et économiques pour la Polynésie française
Dès
le départ, la nouvelle compagnie rencontre d’énormes difficultés de recrutement
local. Ainsi, en 1908, sur les 300 personnes nécessaires, seuls 25 Polynésiens
assurent le travail industriel qui est demandé.
Hormis
les Vietnamiens qui ne retournent chez eux qu’en 1946 pour cause de guerre,
l’ensemble des travailleurs asiatiques quittent Makatea au plus tard en 1934.
Ils sont remplacés par des ressortissants des îles Cook.
Les années phosphates à Makatea
Il
faut attendre 1956 pour que près de 100 % des employés de la mine soient
Polynésiens.
De
1908 à 1966, des milliers d’hommes de tous horizons et de toutes ethnies ont
travaillé à l’extraction du phosphate polynésien, participant ainsi de manière
primordiale au développement économique de la Polynésie française.
Le
train mythique de Makatea
Initialement,
si des engins mécaniques apparaissent, le minerai continue d’être acheminé par
brouettes sur des planches faisant fonction de chemins et même de ponts,
jusqu’aux tapis roulants qui rejoignent les hangars de la CFPO.
Dans la gare de Falaise, le train de Makatea
Ce
n’est que bien plus tard que sera créé le réseau ferré de Makatea. Dessinant
une patte d’oie et d’une longueur de 7 km, il possède même une gare au nom
évocateur de "Falaise".
C’est
en 1927 qu’est construite la première jetée métallique au port de Temao. Longue
de 50 m, elle prolonge le quai au-delà du récif afin de permettre le chargement
du phosphate sur les cargos.
La sauterelle du port de Temao
Puis,
entre 1953 et 1955, est installée une sauterelle, gigantesque passerelle mobile
de 300 m de portée pouvant déverser directement 550 tonnes de minerai à l’heure
dans les cargos.
De
nombreux vestiges de ces installations sont toujours visibles à Makatea.
Du
phosphate de Makatea au nucléaire de Moruroa
De
1908 à 1966, environ 11 280 000 tonnes de minerai d’excellente qualité sont
extraites des entrailles de Makatea.
Il
y eut jusqu’à 3 000 personnes vivant à Makatea, réparties entre les villages de
Moumu et Vaitapaua.
Makatea, une fois le phosphate épuisé…
Mais
l’âge d’or devait prendre fin. En 1962, il y a encore 2 273 habitants
permanents sur l’île. En 1967, il ne reste que 60 personnes, propriétaires et
pêcheurs.
Les
travailleurs polynésiens de Makatea ont rejoint leurs îles respectives. Avec
leur savoir-faire, leur savoir-être, leur sens de la discipline et leurs
qualifications diverses, ces ouvriers deviennent un atout sérieux pour
l’économie de la Polynésie française.
Ils
participent notamment aux grands travaux des installations toutes neuves du Centre
d’expérimentation du Pacifique.
Ce qu’il reste de la passerelle de chargement aujourd'hui
L’ère
des phosphates est achevée, commence celle du nucléaire…
Les photos qui illustrent cet article, proviennent de la
collection Michel Fayadat et des
recherches de Vahineitaria Silvia que
nous remercions chaleureusement.
Cliquez ici pour lire la suite dans notre article "Makatea aujourd'hui"
Cliquez ici pour lire la suite dans notre article "Makatea aujourd'hui"
Un article de Julien Gué
merci pour ce temoignage d un passé qui n est pas si loin magnifiques photos d epoques
RépondreSupprimerJe découvre votre blog, et voudrais vous communiquer quelques scènes que j'ai filmées à Makatea en 1966. La CFPO venait de cesser l'exploitation et avait donné au territoire la totalité de ses installations. J'y ai passé 2 mois loin de tout mais emerveillé par une nature exceptionnelle. La séquence Makatea débute à environ 16 minute 30. Je réside en Nelle Calédonie
RépondreSupprimerhttps://vimeo.com/157236229
jteyssier@lagoon.nc
Merci infiniment, J. Teyssier, pour ce précieux partage. Je vous invite à me contacter en message privé via ma page Facebook ( https://www.facebook.com/julien.gue.7 ).
SupprimerEn vous souhaitant d'autres découvertes agréables sur ce blog...