Musiques, Amours et Révoltes
Il
en va de la musique comme des idées vraiment nouvelles ou des
révolutions : elles naissent toujours quand et où on les attend le moins…
Vous
souvenez-vous du scandale provoqué, en 1970, par un poète incontestable et
pourtant contesté, lorsqu’il osa déclarer… Pardon : hurler avec ce qui lui
restait de tripes : « … La
poésie, ça pue des pieds !… Poètes : vos papiers !... »
Il s’appelait Léo Ferré et l’album, étrangement, s’intitulait : « Amour – Anarchie ».
Quarante
années plus tard, c’est un duo improbable qui reprend le flambeau et le brandit
haut et fort.
Les mots pour le dire
De
par leur existence même, les King's Queer posent la problématique du langage et
du vocabulaire. Tout d'abord par leur identité : gouine, lesbienne,
transboy, que sais-je encore... Et si l'on parlait tout simplement d'êtres
humains comme les autres, avec leurs fêlures, leurs richesses, leurs peurs,
leurs révoltes, leurs faiblesses et, surtout, leurs amours et leurs talents ?
Cette question idiote qui ne devrait pourtant même pas se poser étant réglée,
parlons musique.
Là
encore, les mots se bousculent pour tenter de définir, d'encaser, de classifier, autrement dit de réduire à un genre une
musique qui justement n'en a pas. Une musique qui a, d'abord et avant tout, le
mérite de nous accrocher les oreilles en nous donnant du plaisir, de la matière
à rêver. Alors voilà : Laet et Grib se définissent eux-mêmes comme un « duo post punk ». Possible
qu'ils aient raison. Pourtant, ils ajoutent, dans une (excellente) interview
accordée à Christophe Tixier : « Nous
sommes kamikazes et on aime être là où on ne nous attend pas… King’s Queer
c’est avant tout une fête, une façon de faire des passerelles entre les uns et
les autres. On n’est pas fan des formatages et autres idées reçues ! On
combat avec vigueur les dogmes d’une culture unique. Nous aimons les paris fous
et au diable les étiquettes et autres carcans qu’un système de pensée, de
fonctionner, tente de nous imposer à chaque instant… »
Une interview façon King's Queer
Et
lorsque je leur ai demandé de se raconter…
« King’s Queer est composé de deux personnes, une gouine à mèche :
Laet, et d’un Transboy ( Female to Male) : Grib… Le duo existe depuis
quatre ans. Au départ nous avions monté une performance éphémère pour une
soirée d’art contemporain, mais la mayonnaise a tout de suite pris. Donc nous
avons décidé de continuer. Une date en a appelé une autre, et très très vite
nous passions la moitié de notre temps sur la route. King’s Queer s’est fait à
notre insu, comme on dit souvent on passe notre vie à courir après… »
Autopsie d'un parcours
« Au début il n’y avait que les machines et la voix, et puis
on a décidé d’enrichir nos compositions et nos shows avec des instruments comme
la trompette, clavier, harmonica, mélodica…»
Ce que ne
disent pas nos combattants du rêve et de l'amour, c'est qu'avant même l'arrivée
des machines et de la musique, il y eut le spectacle vivant. Et à considérer ce
que King's Queer propose au public, que ce soit sur scène ou dans la rue, ce
passé là n’a pas été inutile et a laissé de profondes traces. Il suffit pour
s'en convaincre d'aller faire un tour sur leur site (www.kingsqueer.com) ou sur leur page Facebook
(https://www.facebook.com/profile.php?id=100000413976796&ref=ts)
L'album
« Amours et Révoltes », (enfin !) sorti le 6 septembre 2012,
n'est que l'aboutissement logique d'un road movie façon troisième millénaire. A
bord d'un improbable pick-up de location, King's Queer nous entraine de coin de
rue en devanture de boutique, de squat culturel en scène alternative et
intermittente. Il arrive même que le groupe se produise dans des salles de spectacle
reconnues comme telles : c'est dire !
C'est en
totale indépendance que le duo a parcouru l'Europe et les genres (artistiques
s'entend, évidemment ! Quoi que…). Ainsi, la musique des King's Queer a-t-elle
servi à des courts métrages, des spectacles de théâtre, etc.
Vint le moment où
il a bien fallu faire des choix : « En
aout 2011 nous avons décidé de signer avec le label Zingy (http://www.zingy.fr/kingsqueer.html)
L’album était lancé ! On l’a composé en deux mois, enregistré en une
semaine, mixé en trois jours ! Le tout avec pas mal de débrouille et
de système D… Puis ce fut le tournage du
clip « Amours et révoltes » réalisé avec Estelle Beauvais. King’s Queer prend 80% de notre temps, c’est notre
boulot ! Donc comme vous pouvez l’imaginer : on
est en état précaire permanent. Heureusement qu’on a une proprio sympa qui
accepte les loyers en retard !... »
Parlons musique…
Il y a deux
façons très différentes de découvrir la musique de King's Queer : en live,
dans l'un des improbables lieux où ils se produisent et déchaînent sans
concession à la liberté leur folle énergie et la violence de leurs passions/convictions.
Pour cela, c'est simple il faut se rendre sur leur site pour se tenir au
courant des étapes de leur errance et avoir un avant goût en se plongeant dans
les nombreuses vidéos qui s'y trouvent… Où alors le CD, comme je le fais en
écrivant ces lignes… Dans les deux cas, vous serez transportés. Mais pas de la
même manière. Pas pour les mêmes raisons.
Amours et Révoltes : le clip !
En live, vous
serez secoués, percutés de plein fouet par une folle énergie et un besoin
farouche, violent même parfois, de convaincre, de partager… d'aimer quoi !
Techniquement parfaitement mixé, le CD vous permettra de découvrir des textes
d'une immense tendresse et d'une richesse inouïe. Et là, je ne puis résister à
en reproduire ici un extrait :
"A
tous les vendeurs de rêves, Amours et révoltes
A
tous les voyageurs immobiles, Amours et révoltes
A
tous les poètes des verres brisés, Amours et révoltes
A
tous les éternels sales gosses, Amours et révoltes
A
tous les plasticiens aériens, Amours et révoltes
A
tous les lieux éphémères, Amours et révoltes
Pour
tous les Peter Pan, Amours et révoltes
Pour
tous les irradiés, les contrariés, Amours et révoltes
Pour
tous les courtisans de la lune, Amours et révoltes
Pour
tous les clochards célestes, Amours et révoltes
Pour
toutes les "fées carabines", Amours et révoltes
Vivons
heureux !..."
Pour ma part, la
plume de Grib me fait immanquablement penser à la poésie qui pue des pieds
chère à Léo Ferré, fait ressurgir la voix rauque de Bernard Dimey me racontant
les roses des bas-fonds dans le « Bestiaire de Paris » et la rage de
Jacques Higelin dans « BBH 75 ». Mais ce serait renier la richesse
novatrice des compositions de Grib que de s'en tenir à des comparaisons
forcément réductrices. Pourtant, une référence m'avait sauté aux oreilles dès
la première écoute de « Amours et Révoltes », c'est une filiation
directe avec le
hard-rock métissé à l'extrême du groupe Dazibao dans les années 80.
Mais parler de la
musique, c'est ne pas l'écouter, alors vous savez ce qu'il vous reste à
faire !...
Comment écouter King's Queer ?
Ça, c'est simple
et ce n'est pas compliqué ! Mais pour tout vous expliquer, je préfère
donner la parole à King's Queer. Et si je dis King's Queer, c'est que je ne
sais pas qui de Laet ou de Grib a répondu à mes questions !…
« Le CD est en Auto Distribution…On
assure cela avec notre
Label Zingy. Pour nous il était important d’être vraiment indépendants pour
avoir une liberté totale de création. Nous n’avons pas super envie de faire
marcher une machine qui nous broie ! L’industrie du disque est une
véritable industrie et ses critères de fonctionnement ne correspondent pas à
notre éthique. Nous ne sommes pas des produits ! L’album CD « Amours
et Révoltes » est gravé à 1000 exemplaires. Il est sorti le 6 sept 2012 et
grâce au fonctionnement de réservation/souscription, il n’en reste déjà plus
que 500… Et nous ne sommes pas encore partis en tournée ! Quant au vinyle,
c’est un pressage de 300 exemplaires, dont chaque pochette est unique et
numérotée. C’est un objet rare de collection… Alors, pour les trouver : soit
les live de King’s Queer, soit les commander chez Zingy. Sinon, il reste la
formule numérique aussi… Par ailleurs il sera disponible dans certaines distro…
Une distro c’est des gens, des collectifs, qui courent les festivals
alternatifs en proposant des tables de presse, vinyles, cd…etc… »
Parfois aussi, le pick-up de King's Queer s'arrête sur un parking, juste sous les fenêtres d'une radio, et cela donne ça...
Parfois aussi, le pick-up de King's Queer s'arrête sur un parking, juste sous les fenêtres d'une radio, et cela donne ça...
Amours et Révoltes
Ce n'est vraiment
pas souvent que mes oreilles sont séduites à ce point. Elles l'ont
incontestablement été par la musique de King's Queer. Ce qui est infiniment
plus rare, c'est que je l'ai été également par les textes de l'album. Comme je
l'ai été par la personnalité des OVNI humains que sont Grib et Laet, par leurs
engagements sans concession, leur pureté et leur énergie vitale.
Si, comme moi,
vous pensez que la liberté est dans la rue, pas dans les partis, les églises, où
les radios et télés propres sur elles, alors ne laissez pas passer cette
merveilleuse occasion de vous nettoyer les oreilles et les neurones…
Amours et
Révoltes !... à tout jamais.
Un article de Julien Gué
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