La seule revue littéraire
de Polynésie
Isolée au milieu d'un océan
Pacifique essentiellement anglophone, la littérature polynésienne éclot, telle
une rare et belle fleur de tiare apetahi.
C’est
pour accompagner ce foisonnement de mots, pour que chaque plume polynésienne
ait au moins une chance d’être publiée, qu’a été créée la revue Littérama’ohi*
par un groupe d’auteurs à Tahiti.
Naissance d’une
revue littéraire
Avant
toute chose, il faut rendre hommage à ces sept Polynésiens pour avoir eu
l’audace de se lancer dans cette aventure. Ils s’appellent : Patrick Amaru, Rai
Chaze, Flora Devatine, Danièle-Taoahere Helma, Marie-Claude Teissier-Landgraf,
Jimmy Ly et Chantal T. Spitz. Tous écrivains et écrivaines, bien sûr.
Le tout premier numéro de Littérama’ohi |
A
l’époque, cela se passait en 2002, la
Polynésie française vivait les dernières années du « règne » de
Gaston Flosse. Pour les artistes, cette époque signifiait tout simplement faire
allégeance au politique ou garder ses œuvres pour soi. Aujourd’hui, le roitelet
est revenu au pouvoir et les inquiétudes son grandes quant à l’avenir de cette
liberté d’expression.
D’autre
part, et pour les mêmes raisons, en ce début de millénaire, les éditeurs
polynésiens ne prenaient aucun risque et ne publiaient quasiment aucune œuvre
de fiction. Pourtant, nombreux étaient celles et ceux qui entassaient des pages
noircies de mots, de phrases et d’idées, qu’elles soient en langue française,
ma’ohi ou autre.
La présentation actuelle de la revue |
C’est
donc bien afin de permettre à la parole polynésienne écrite d’être entendue que
ces hommes et femmes de lettres ont décidé de lancer une revue littéraire,
participant ainsi à la reconnaissance de cette
littérature polynésienne naissante.
Littérama’ohi,
ramées de littérature polynésienne
Ainsi
se nomme cette revue (avec en sous-titre Te Hotu Ma'ohi) qui prépare
en ce moment son 19ème numéro, et ce nom n’est pas anodin.
-
Littérama’ohi ; ce mot, créé pour l’occasion, signifie à la fois
l’affirmation de l’identité polynésienne et une porte ouverte sur le monde
littéraire.
-
Ramées de littérature polynésienne ; cette proposition fait, bien
évidemment, référence aux rames de papier, mais aussi à celles des pirogues si
chères aux Polynésiens et à leur culture mixte : polynésienne et francophone.
-
Te Hotu Ma'ohi ; pour signifier la création si féconde en terre
polynésienne.
Les caractères chinois qui accompagnent la revue |
-
Pour finir, la présence des caractères chinois intercalés entre titre (en
Français) et sous-titre (en Reo Tahiti*) souligne et renforce cette idée de la
fécondité originelle par la référence au ginseng ou jing shen**.
Le fanal de la
littérature polynésienne
Réalisée
par une équipe entièrement bénévole, Littérama’ohi n’a d’autres
ressources que celles des ventes qu’elle réalise. Ce qui signifie que, pour
chaque nouveau numéro, il faut à l’équipe de bénévoles qui gère la revue
développer des trésors d’énergie et d’imagination pour boucler le budget de
fabrication. Ce qui passe souvent par des avances financières de ces mêmes
bénévoles.
Malgré
cela, et malgré les obstacles érigés sur sa route par les tenants de l’ancien
pouvoir local, le numéro suivant est en préparation et devrait être disponible très
bientôt. Car Littérama’ohi, envers et contre tout, a largement dépassé
ses dix années d’existence.
Et
le succès est bien là pour honorer celles et ceux qui ont cru à cette idée
folle qu’il y avait de la place pour une revue littéraire consacrée aux
artistes polynésiens.
Lors
de sa création, Littérama’ohi avait trois objectifs :
- tisser des liens
entre les écrivains originaires de la Polynésie française,
-
faire connaître la variété, la richesse et la spécificité des auteurs
originaires de la Polynésie française dans leur diversité contemporaine,
- donner à chaque
auteur polynésien un espace de publication.
Ils
peuvent être rassurés : les trois sont largement atteints, voire même plus.
Un
autre objectif qui poussait les fondateurs de la revue était de créer un
mouvement entre écrivains polynésiens.
Une lecture publique au marché de Papeete |
Celui-là
aussi a été réalisé et dépassé. Il suffit, pour s’en convaincre, de consulter
la longue liste de ceux qui, à un moment ou à un autre, occasionnellement ou
régulièrement, ont contribué par leurs écrits au succès de ce qui est,
aujourd’hui encore, l’unique revue consacrée à la littérature polynésienne.
Diversités de
cultures et d’écritures
D’origines
très diverses, les Polynésiens sont à la fois multiples et uniques. Et qu’ils soient
d’origine océanienne, asiatique ou occidentale, ils écrivent tous par et pour
leur identité culturelle polynésienne si particulière.
La
preuve en est apportée par toute immersion, aussi brève soit-elle, dans
n’importe lequel des numéros de la revue où les langues elles-mêmes se
mélangent, s’interpellent et se répondent.
La dernière publication de Littérama’ohi (lire en cliquant ici) |
Se
mélangent aussi les centres d’intérêts, les styles et jusques aux formes
littéraires qui se bousculent pour affirmer leur existence propre.
Ainsi
se côtoient des essais d’universitaires, des poèmes, des extraits de romans,
des nouvelles, des pamphlets… Jusqu’à une pièce de théâtre écrite en prison par
un groupe de détenus qui fut publiée dans le n° 17 de Littérama’ohi.
Une revue
accessible par tous et partout
Si
les Ramées de Littérature Polynésienne ne sont disponibles que dans les
trop rares librairies de Papeete à Tahiti, il est aisé de se les procurer en
les commandant directement sur le
site Internet de la revue.
« Pina’ina’i », le n° 20 de Littérama’ohi |
Site
grâce auquel on accède au sommaire de chacun des numéros de la revue de la
façon la plus simple qui soit.
D’autre
part, l’équipe de Littérama’ohi
anime une page sur Facebook, permettant ainsi au plus grand
nombre, et depuis les quatre coins de la planète, de se tenir au courant au
jour le jour de l’actualité littéraire en Polynésie française.
La référence au ginseng ou jing shen |
Enfin,
depuis quelques mois et dans le but d’attirer la population polynésienne vers
la lecture, l’équipe de la revue crée et anime des événements de toutes sortes
comme des lectures publiques, par les auteurs eux-mêmes, au milieu des étals du
marché de Papeete, une nuit de la poésie…
La
littérature polynésienne, aussi jeune soit-elle, est riche et vivante et mérite
largement d’être découverte. Litterama’ohi est le meilleur moyen de
cette découverte.
Un article de Julien Gué
Lexique :
Reo Tahiti : langue vernaculaire de
l’île de Tahiti ;
Ginseng ou jing shen :
plante médicinale chinoise censée restaurer l'essence (Jing), favoriser
l'énergie (Qi), éveiller l'esprit (Shen) ;
Liens :
Le site de
la revue :
La page
Facebook de Litterama’ohi :
Tous droits réservés à Julien Gué. Demandez l’autorisation
de l’auteur avant toute utilisation ou reproduction du texte ou des images sur
Internet, dans la presse traditionnelle ou ailleurs.
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