La Tunisie
laïque était dans la rue
Dans une Tunisie que les stigmates des
affrontements récents, tatoués salafisme, hérissent de herses et de chars autour
des bâtiments gouvernementaux, le 20 mars 2012 s’est fêté dans une liesse sans
compromis.
Fleur rouge à la
tourelle
A l’affiche de cette journée nationale
qui affranchit historiquement le pays de toute forme de joug étranger – un
certain printemps 1956 -, « l’indépendance en toute indépendance »,
clament les manifestants.
Un pays qu’on enchaîne ?
Pas si sûr ! Les fantômes ébène se
terrent à la coupole d’El Menzah ! Et la foule les conspue. Bien décidée à
ne pas se faire mettre aux fers. Au grand jour, « les
cris sourds du pays qu’on enchaîne » deviennent clameur, souligne
Tunisie-news.com.
Un document filmique signé du
réalisateur Ibrahim Letaïef, participe de ce témoignage. L’estimation du nombre
des manifestants sur la capitale oscille de 20 000
à 73 266. Le consensus est
net : « On ne touche pas à nos droits ! »
La chaise éjectable
C’est tout de même une prise de
conscience qui se déploie avec la même ampleur sur l’ensemble des grandes
villes du pays. La dictature ne passera pas. Ce 20 mars prend les devants et
les poings se lèvent aux accents de l’hymne national.
Au palmarès des slogans sans parole, un
simple avertissement sans retour. Une chaise, brandie haut, passe de mains en
mains : son parcours s’achève par une culbute sous les tollés. Le trône
vacille. Et la foule est joyeusement solidaire. Elle n’a plus peur !
Désistement historique de la Constituante
Pour
preuve ? La nation est venue célébrer sa victoire en famille. Les victimes
honorées appartiennent au passé. « Plus jamais ça ! ».
Aujourd’hui, la leçon de l’indépendance est pratique : elle se transmet
d’ancêtre à nouvelle génération. Elle s’intitule citoyenneté.
Un même voile, le drapeau.
Au
fronton des aberrations anticonstitutionnelles, le désistement d’un
gouvernement devenu invisible à l’occasion, fera date dans la suite des
atermoiements et autres lâchetés dont il fait preuve depuis plusieurs mois.
L’indépendance
a été flétrie par le pouvoir en place. Prudemment s’est-il éclipsé.
Craindrait-il de se montrer en public ? Chancellerait-il tant à
l’ombre du palais pour ne plus proclamer victoire ?
En sourdine, bien sûr, des fanions ténébreux
obscurcissent certains minarets. La capitale ne flambe pas du rouge des
drapeaux. La richesse de Carthage, la pourpre, escamotée pour une question de
tissu ?
Un même voile, le drapeau !
Tandis
que les citoyens paradent sous les plis du drapeau, les banderoles officielles
sont rares. Les employés municipaux exemptés d’accrochage. Etrange mutisme des
murailles !
Chechia au top !
A
la rambarde, au parvis du Théâtre, le pétale rouge éclot. En cape, en voile, en
tunique, T-shirt, toile, carton, chechia, tunique, le quidam est étendard,
gonfalon, oriflamme.
Il
n’est pas que les pancartes qui parlent. Chacun vient couvrir de sanguine la
page blanche de l’Histoire. Liberté, parité, démocratie. Un prénom, une
signature, une goutte d’acrylique pour conjurer le « monument des
vivants ».
Démocratie pour tous
Achevée,
l’ère des martyrs. Les voix se font entendre. Venues du plus profond des
souffrances secrètes. Les victimes des salafistes dénoncent. Leur harangue
reprise en écho.
Voix de Femmes de Nabeul
La
chaîne des bravos se cadenasse et se solidarise. Les « Voix de femmes de
Nabeul » révoquent les « mutilations barbares », invalident les
« pratiques indignes », les « anathèmes » de l’humiliation,
exigent « respect » de leur intimité.
« Parité »,
comme leitmotive de cette autonomie mutuelle ; « chariâa
abolie », « esclavage, ravage ! », « dictature,
dégage ! ». Le ton monte. Avec lui, cette lueur d’espérance (Amel) comme
un refrain d’avenir.
Alors, chapeau les Tunisiens !
Face
à la démence mortifère, l’Indépendance a pris couleur de vie. Celle du sang qui
bouillonne, mais ne se répand pas. « Une
fête de l'indépendance vraiment indépendante! »
Un article de MonaK
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