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samedi 13 février 2016

FIFO 2016, Ateliers




















Naissance d’un film

Le bilan du FIFO se clôt-il dès le palmarès prononcé ? Ne se solderait-il pas plutôt en considérant son impact ? Son effet est multiple : il retentit sur les instances culturelles et le milieu professionnel du cinéma. Il se répercute aussi sur la perception du spectateur lambda assis aux antipodes, mais surtout il renforce l’attachement du public au monde du cinéma.

En effet, l’organisation du FIFO, ne se contente pas de diffuser un catalogue abondant d’images d’Océanie. Il implique activement le public présent ici à la manifestation : à coups de rencontres pondérées par le cadre naturel du paepae, de débats à chaud en salles, d’opinions quêtées sur le vif et divulguées sur le net. Grâce aux traductions simultanées, il en accentue la communicabilité. Et c’est tout à son honneur.

Débats décontractés sur le paepae…
S’adressant aux néophytes par la multiplication d’ateliers de tous ordres, le public ne serait-il pas l’une des priorités du FIFO ? L’enjeu majeur étant bien entendu la divulgation du cinéma documentaire océanien. C’est intelligemment vu. Les conséquences en sont doubles : former un public à la machinerie du cinéma, non seulement technique (ipad, scénario, prise de vue et montage, cinemagraph), mais aussi aux critères de la réalisation (intention, cadrage, plans, rythme, etc.) et au bien-fondé de la critique.

Des journées entières retenues pour familiariser les scolaires à la culture cinématographique. Ce n’est pas du luxe. Autant commencer tôt pour sensibiliser un public de cinéphiles. Et l’interactivité est une manière astucieuse de laisser place au champ des possibles et à la multiplicité des points de vue : apprendre en faisant.

Le court qui décoiffe…
Si la « Nuit du Court » en est à sa 7ème édition, ce n’est pas pour rien. Le court métrage connaît un véritable engouement auprès des jeunes qui en fabriquent eux-mêmes les films. Un regard futé, judicieux, drôle, et particulièrement aiguisé. Et ils n’ont pas froid aux yeux ! En visionnant Tahiti de Gatien Raurii, vous aurez 1mn 30secondes pour faire le tour des travers comme des bonheurs de la société polynésienne. La misère sociale, politique et culturelle : on peut en rire. Plaisir ludique garanti !

Public averti : public exigeant !

Un atelier à portée de main
Parmi les Ateliers FIFO destinés au grand public, il faut remarquer qu’ils s’intensifient depuis trois ans et qu’ils abordent les dernières nouveautés technologiques. Nous avons choisi celui de « Prise de vue et montage sur Ipad » pour deux raisons. Avec le matériel à portée de main des amateurs ou des débutants, il correspond d’abord à l’envie de chacun de le rentabiliser. Parallèlement, Salle Marama à la Maison de la culture de Papeete, l’animateur est Nyko PK16, présent à double titre, pour cette fête du cinéma.


Atelier ipad salle Marama 
Lauréat 2015 du « Vini film festival on TNTV » avec le meilleur scénario, il figure dans la « 7ème Nuit du court » pour Avec le temps. De plus, avec ses studios Hashtag, il fait partie de l’actualité polynésienne avec Moana. Disons qu’il appartient à cette nouvelle génération de cinéastes d’ici, qui font parler d’eux à l’international.  

Une génération montante dont l’inventivité n’est plus à prouver et qui se dote des moyens tout personnels pour parvenir à émerger sans attendre que la perche des subventions leur soit tendue. C’est sa déontologie, c’est autrement abordé avec le thème de son mini court-métrage : ne pas compter sur le temps mais sur le faire. C’est aussi l’objectif de l’atelier : se prendre en charge, se lancer, s’affirmer, boucler.


Une envie de réaliser avec Nyko PK16
Le public qui fréquente son atelier est reconnaissable à son assiduité. Tôt arrivé, même en avance, il ne se résout à quitter la petite salle climatisée qu’à la dernière minute, voire, après prolongations. Balayant divers horizons, il s’adresse aux scolarisés de plus de 15 ans, et à une audience adulte échantillonnée : du simple amateur à l’enseignant caressant un projet pédagogique, de la mère au foyer au retraité, du bidouilleur au novice.

Pour que l’atelier aboutisse au mieux, Nyko PK16 ne ménage pas sa générosité et il montre le chemin d’une véritable coopération d’équipe. Chaque poste de montage rassemble des contributeurs qui ne se connaissaient pas auparavant et vont réaliser, en une demi-journée, un mini-documentaire ou une docu-fiction, pris sur le vif dans le village du FIFO. Avant de capter l’image, il est indispensable d’en fixer le préalable, c’est-à-dire l’argument des coréalisateurs.

Le 4ème tome de Patrice Guirao sera-t-il terminé ?
Et bien entendu, pourquoi ne pas filmer le cinéma en train de se faire ? La série tahitienne Al-Dorsey, née des entrevues de hasard au FIFO, par exemple. Pourquoi ne pas élucubrer sur la tétralogie de Patrice Guirao… et sur les rebondissements imaginaires d’un casting qui bat son plein dans un stand tout proche. Le sujet s’est vu traiter par un trio bien tranquille…


De l’atelier au casting
Public formé rime avec intelligence critique. On aurait tort de considérer le cinéphile comme un consommateur de chips qui compenserait la nullité des télénovelas par une boulimie intempestive. Il n’est pas aberrant d’allier intellect, conscience politique et divertissement : Le Dictateur de Charlie Chaplin en constitue l’un des modèles les plus exemplaires, qualifiable par ailleurs d’anticipation-documentaire. L’œuvre d’art ne joue-t-elle pas ce rôle de mobilisateur de consciences ? « On apprend en se divertissant », affirment les Ateliers et leurs apprentis.

« Avec le temps », va… tout s’apprend.
Qui dit popularité d’un film n’en exclut ni l’intelligence, ni le sérieux de la construction. Quant aux effets comiques et grossiers, du moment qu’ils participent de la vision exceptionnelle du réalisateur… ils n’entachent pas la valeur de l’œuvre.

Le film documentaire océanien est en passe de devenir un cinéma d’auteur.

Nous l’avons vu avec The Ground we won, primé pour la qualité de ses plans rapprochés et la teneur d’une narration intimiste. L’identité nationale néo-zélandaise, à savoir le vacher-rugbyman, est écornée par la mise en exergue de la culture sportive machiste. Mais l’aspect humain, vulnérable, sentimental y affleure. Chris Pryor et Miriam Smith révèlent sans concession l'art du documentaire immersif. 

« Moana », un rêve de Nyko PK16
Du plancher des vaches, nous passons aux planches de l’automne de la vie, d’histoires d’hommes à celles du regain, de la vigueur… à l’urne funéraire, aux cheveux blancs et aux ongles incarnés. Ainsi nous ne pouvons sous-estimer Hip Hop-Eration. Grâce au scénario et au montage fictionnel, il laisse de côté le buzz médiatique pour coller à une réalité qui ne tient qu’à un fil, à un souffle. Et le spectacle continue.

Au vent de l’océan
Le documentaire océanien, avec ses images du quotidien, bouscule les idées reçues et les images lissées de l’hégémonie du cinéma commercial. C’est peut-être dans ce domaine si proche du spectateur que se situe sa postérité. Pas de cinéma clinquant.

Un petit regret cependant. Pour la première fois que Wallis & Futuna figurent avec une production autonome au FIFO, dans la sélection « Pacific Islands », le 13mn Ciné des toiles d’étoiles, ne sera diffusé qu’une seule fois. L’un de ses réalisateurs Anthony Taitusi de l’Association Cafe fale est en bonne passe de faire vivre son rêve de cinéma avec  une prochaine série de fiction réalisée avec les quelques petits moyens de leurs fonds propres : Be You, Foha Tahu. Qu’on se le dise…

L’aventure de notre siècle
Nous saluerons une fois de plus les réalisateurs et leurs équipes de techniciens qui ont su opérer le petit miracle de la transmission. La culture ne campe pas sur un site archéologique aux danseurs momifiés, ni sous la poussière d’archives endormies : elle vit au cœur des fusions ou des transpositions qui nous les rendent proches, comme pour Tupaia ou Te Mana o te Moana.
Et, pour terminer sur une image de mise à flot du cinéma océanien, un cinéma qui bouge : Bon cap au FIFO…


Un article de  Monak
Photo du bandeau : Atelier Cinemagraph, Luce Pasquini, FIFO 2016 : « Pass »
Pour le début de cette 13ème édition, vous pouvez consulter :


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