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samedi 5 juillet 2014

Sousse et ses environs


Sahel tunisien en camaïeux 

Des bleus aux verts, entre les deux golfes qui le délimitent du nord au sud, le Sahel fait saillie sur la Méditerranée : « ventre arrondi » de la Tunisie, il s’échancre de baies nombreuses comme autant de seuils accessibles aux incursions venues de la mer.

C’est de cette série de fluctuations dont accouche l’histoire de la région. Avec son relief peu accidenté, le Sahel n’est pas uniquement balayé par le dieu de la mer, Oceanos, rendu célèbre par les mosaïques de Sousse. Si la promenade urbaine peut encore s’effectuer en calèche dans la plupart des stations balnéaires, c’est dans des conditions bien meilleures que celles rapportées par Gide.

Sahel, le « ventre arrondi » de la Tunisie
 A la fin du XIXème siècle, dans les pages de L’Immoraliste (1902), il écrit : « La diligence de Sfax quitte Sousse (…) Sitôt sortis de Sousse et de l’abri de ses collines, le vent commença de souffler (…) Rien ne m’attirait plus que Carthage (…) les mosaïques de Sousse et l’amphithéâtre d’El Jem. (…) ». Et dans Les Nourritures terrestres, 1897, n’avait-il pas déjà écrit : « Sousse, (je me souviens de) tes oliviers » ; et encore : « Le sable se veloute délicatement dans l'ombre; s'embrase au soir et paraît de cendre au matin ».

Le ventre de la Tunisie
L’histoire connue de la région commence dans l’Antiquité, sous l’aura de l’Empire de Carthage puis d’un certain Hannibal qui lui a assuré sa gloire. Après la conclusion d’une longue lutte entre les deux puissances (146 avant J.-C), le territoire jouit d’une période confortable de paix et d’opulence. Sous le règne de l’empereur Dioclétien (284-305), la province romaine de l’actuel Sahel joue un rôle prépondérant avec la création de la Byzacène. En effet la Province d’Afrique est divisée en trois (la Tripolitaine, la Byzacène et l'Afrique proconsulaire résiduelle, aussi appelée Zeugitane.).

Les terres vertes de M’Saken
Ce n’est pas seulement la richesse de l’oléiculture et de la mer, la créativité artistique carthaginoises qu’exploite Rome après avoir vaincu Hannibal mais aussi un art de vivre : la mosaïque et ses reproductions de la vie quotidienne en témoignent. Labeurs et loisirs des jours, champêtres et aquatiques, s’y côtoient.

Que l’époque soit antique ou contemporaine, les plaisirs de la table sont reproduits par l’art urbain ou l’intérieur des demeures privées avec ses deux sources d’abondance qu’offrent la terre et la mer. A Salakta, petit hameau portuaire, les mosaïques illustrent l’activité de la pêche : « Le littoral est jalonné par les fabriques de salaisons ou autres produits dérivés du poisson, comme la sauce appelée garum, un condiment fondamental de la table romaine. », rapportent les historiens latins.

Oceanos et Olive aux  frontons de l’Antique et du moderne
M’Saken s’orne, au XXème siècle, d’un monumental rond-point où la goutte d’huile, telle une perle dorée, surmonte une composition entrelaçant olives et feuilles ornementales. Serait-ce cette référence à « l’or vert » (l’huile d’olive), sur lequel se sont bâties les fortunes du gouvernorat qui aurait donné son surnom à sa capitale, Sousse ? Ou son panorama bordé de rivages blonds et de collines verdoyantes ?

Sousse, “La Perle du Sahel”
Elle se nomme Hadrumète à sa fondation phénicienne au 9ème siècle av-JC. Carthaginoise ensuite, Hannibal y établit son camp lors de la seconde guerre punique et c’est du port qu’il attaque les Romains avant sa défaite à Zama (202 av.JC).

La médina de Sousse
De Zama, on ignore toujours la réelle localisation : « L'historien romain Cornelius Nepos mentionne le premier le nom de Zama pour la situer, près de cent cinquante ans après l'événement. Tite-Live, quant à lui, parle de Naraggara (aujourd'hui Sāqiyat Sīdī Yūsuf) ».

Capitale de la Byzacène sous Dioclétien (234-305), elle développe une importante communauté chrétienne, bien que persécutée (du 2ème au 4ème siècle), dont on retrouve les vestiges sur plus de 5 km de galeries souterraines ou catacombes. Nécropole (15 000 sépultures pour 240 galeries) et lieu de culte clandestin, tout comme Salakta, elle abrite gravures sur marbre et épitaphes. Les  persécutions reprendront à la fin du VIIème siècle, avec la conquête arabe. Le musée archéologique Tour Khalef-el-Fata, consacré à la mosaïque, recèle des spécimens chrétiens.

Dans le dédale des catacombes
Prise par les Vandales puis par les Byzantins au 6ème siècle, elle est détruite par les conquérants arabes avec Oqba Ibn Nafii. Elle est reconstruite par les Aghlabides* (fin du 7ème siècle) qui la nomment Sousse, nom emprunté au berbère, et la dotent d’un chantier naval. Elle doit l’épaisseur impressionnante des remparts de la kasbah et du ribat à sa situation au ras de la mer.

Le ribat, ou monastère fortifié gardé par les mourabitin (moines soldats), est bâti par les Aghlabides pour servir de protection contre les Chrétiens et de refuge à la population. La grande mosquée (851) ressemble elle aussi à une forteresse. Au IXe siècle, la ville connaît une cohabitation entre musulmans, chrétiens et juifs, qui lui vaut sa prospérité.

La Sousse nouvelle
Sous la pression constante de la Sicile, de l’Espagne, de la France et des Vénitiens qui viennent l’assaillir, Sousse est aussi rançonnée par les pirates. Sous la domination ottomane (1574-1881), elle coule des jours prospères. Sous le protectorat français, elle devient le principal port d’exportation du phosphate. Occupée par l’armée allemande, elle est bombardée par les alliés durant la seconde guerre mondiale (1942-43).

Sousse compte 230 000 habitants, 400 000 avec l’agglomération totale. La médina traditionnelle, enceinte de remparts ombrant des souks couverts aux échoppes de tisserands, se prolonge par la ville coloniale et les quartiers portuaires et modernes.

Sousse, de pierre et d’eau
Les trois ensembles convergent vers la Place Farhat Hached., militant indépendantiste. Les circonstances et les commanditaires de son assassinat en 1952 « semblent directement liés à des organisations colonialistes françaises ». Né dans les îles Kerkenna, toutes proches, l’archipel fut aussi le refuge d’Hannibal...

Un clair de terre sous la lune …
Le Sahel tunisien ? Un patchwork de cultures, un quadrillage de sites et de champs.

Un métissage entre le traditionnel et le moderne comme à Port El Kantaoui. De style andalou revisité, la marina arbore ses murs blanchis à la chaux, ses toits bas et plats, ses arcades, ses balcons ombragés et ses terrasses délicatement fleuries de jasmins et de bougainvilliers.

La maison Bleue de « Tiziri 13 »
Le Sahel : une région qui renoue, depuis la révolution, avec ses racines berbères, grâce aux artistes. Bien que les motifs aient toujours été présents dans l’artisanat, la réalité berbère avec sa langue, ses chants, avait disparu de l’espace public. Mais l’imaginaire lunaire, son calendrier, commun avec la tradition arabe, est resté très vivace. 

Tiziri, c’est « le clair de lune, la pleine lune », la 14ème phase de la lune. Désormais, il faudra compter avec la maison bleue de « TIZIRI 13 », à Sousse : là où la 13ème lune s’accomplit…

Un article de  Monak

Tous droits réservés à Monak. Demandez l’autorisation de l’auteur avant toute utilisation ou reproduction du texte ou des images sur Internet, dans la presse traditionnelle ou ailleurs.



*Aghlabides : dynastie arabe (800-909) d’Ifriqyia, dominée par  les abbassides et vaincue par les Fatimides ;  leur capitale est Kairouan.

Voir aussi :  http://tahiti-ses-iles-et-autres-bouts-du-mo.blogspot.com/2014/06/le-sahel-tunisien.html 




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