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vendredi 27 septembre 2013

Bizerte en Tunisie


Le cap stratégique nord

A cinq kilomètres du Cap Blanc, pointe septentrionale de l’Afrique, à quelques sept cents encablures de la Sicile, le gouvernorat de Bizerte flirte avec l’histoire.

« Venise africaine » pour certains, Bizerte émerge d’une région lacustre aux turbulences politiques plus que méditerranéennes ! Au carrefour des « courses »  pirates, sur la route militaire Gibraltar-Malte-Suez, dans le sillage des pétroliers, ce port bien protégé fut toujours objet de convoitises des puissances antiques, médiévales ou contemporaines.

La Venise africaine entre mer et lacs
C’est dès le début du XXème siècle que Bizerte scelle réellement son destin et, avec le sien, celui de la Tunisie indépendante. Entre Cap Blanc et Cap Farina, enjeu des puissances de l’Axe (nazisme et fascisme, franquisme et vichysme associé) et de l’affrontement des bases alliées (les exigences de Roosevelt, de Churchill et les prérogatives Gaulliennes), elle aura fort à s’affirmer.

Aux emblèmes halieutiques
Pline le Jeune (60 ap. JC) rapporte dans une lettre cette chronique prise sur le vif de l’Antique Bizerte ou Hippone :
« Près de la colonie d'Hippone, qui se trouve en Afrique sur le bord de la mer, on voit un étang navigable d'où sort un canal qui, comme un fleuve, entre dans la mer ou retourne à l'étang même, selon que le flux l'entraîne ou que le reflux le repousse.
La pêche, la navigation, le bain y sont des plaisirs de tous les âges, surtout des enfants que leur inclination porte au divertissement et à l'oisiveté. Entre eux, ils mettent l'honneur et le mérite à quitter de plus loin le rivage ; et celui qui s'en éloigne le plus et qui devance tous les autres, en est le vainqueur ...
Dans cette sorte de combat, un enfant plus hardi que ses compagnons s'étant fort éloigné, un dauphin se présente et tantôt le précède, tantôt le suit, tantôt tourne autour de lui. Enfin, il charge l'enfant sur son dos, puis le remet à l'eau ; une autre fois, il le reprend et l'emporte tout tremblant, d'abord en pleine mer, mais peu après il revient à terre et le rend au rivage et à ses compagnons. »

L’enfant au dauphin d’Hippone
Le dauphin n’est pas le seul signe qui témoigne de l’alliance entre les Bizertins et le milieu aquatique depuis leur origine. Le blason de la ville porte, entre autres, trois hippocampes, poisson fétiche de la Tunisie, et une trirème carthaginoise voguant sur les flots… Quant aux recettes de poisson qui courent d’un cap à l’autre, Bizerte tient à la suprématie de son poisson séché, la mandole ou chawri…

La légende des « croqueurs de tête de poisson »
Avant toutes choses, faut-il rappeler que le gouvernorat de Bizerte, adossé aux collines arrosées et fertiles, héberge deux lacs contigus de part et d’autre de Bizerte. A l’ouest, le lac d’Ichkeul et son parc classé par l’UNESCO au patrimoine mondial des réserves naturelles. Des centaines de milliers d’oiseaux migrateurs viennent y faire étape. A l’est, le lac de Bizerte s’ouvre sur la mer par un goulet étroit.

Un phénomène exceptionnel régule la spécificité de la région lacustre. L’hiver, les eaux douces d’Ichkeul se déversent dans le lac de Bizerte. A la saison chaude, l’évaporation provoque le courant contraire sans que le lac de Bizerte ne salinise Ichkeul. On rapporte qu’il contient douze espèces de poissons et que chacune prédomine pendant un mois de l’année…

Mont et lac d’Ichkeul
De tous temps, le chenal propice à la pêche est à l’origine d’une pratique devenue proverbiale. Le Bizertin pêche à la main, en plongeant ; d’un coup de dent mortel sur la tête du poisson, il le neutralise, l’embroche ensuite sur un aiguillon. D’où ce surnom de « croqueurs de tête de poisson ». Mais le Bizertin nous étonne par bien d’autres aspects frétillants de son caractère.

Du comptoir phénicien au « Toulon » africain
La phénicienne Ubbon (qui signifie golfe) devient Hippo Akra (après son annexion  par le Syracusain Agathocle en 310 av.JC), puis Hippo Diarrhytus (golfe arrosé par des eaux abondantes) après la défaite de Carthage. Romaine puis vandale (439) puis  byzantine (520), après une trentaine d’années de sièges, arabisant en Benzart (695) son nom phénicien, elle passe des Aghlabides, aux Fatimides, à la dynastie berbère des Zirides (972), puis aux Hilaliens.

Les souverains Hafsides connurent quelques deux siècles bien agités (XV-XVIII) entre Charles-Quint et les bombardements français et vénitiens. Ils s’achèvent par l’installation ottomane appuyée des pirates dont Baba-Aroudj (Barberousse) et son frère Khair-Eddin. Le pouvoir beylical demeure pendant le Protectorat.
  

Des trirèmes, des héros… (Voir la vidéo)
Base aéronavale conçue par le Protectorat français de 1891 à 1901, Bizerte devient port de guerre après les aménagements du goulet (1895), des collines pour batteries. Son arsenal installé en fond de lac à Ferryville est relié par un transbordeur avec sa rive nord.

Cependant, durant la 2nde Guerre mondiale, Bizerte tombée aux mains du nazisme et du vichysme après l’ultimatum Allemand du 7 déc. 1942, réagit en sabordant ou en échouant quelques navires durant l’opération « Torch » (préparant le terrain pour le débarquement allié d’Alger). Beaucoup de pertes et d’exode civils s’ensuivront dans les bombardements qui se succèderont jusqu’à sa reconquête par les alliés en mai 1943.

L’Audacieuse se saborde à Bizerte
Malgré l’Indépendance décrétée en 1956, la base de Bizerte ne sera libérée que le 15 octobre 1963 ! Le bras de fer engagé par Bourguiba contre De Gaulle durera 7 ans !

Un militantisme qui ne s’en laisse pas conter
Même si les coups de cœur ont uni entre eux découvreurs ou créateurs des deux communautés, et nous ne citerons que Roland Garros pour sa traversée Fréjus-Bizerte en 1912, Bizerte fait partie des foyers les plus actifs pour son engagement anticolonialiste.

 Dès 1921, le mouvement national tunisien (le Destour) inaugure une cellule dans la medina de Bizerte. En 1924 la Confédération Générale des Travailleurs tunisiens y est très active (revendications, émeutes). Les représentants religieux y vont de leur fatwa, pour soulever la question de la naturalisation.

Roland Garros, un certain 22 septembre 1912
La manifestation de 1938, protestant contre la déportation du leader local du parti Hassan Nouri, se solde par six morts par les forces de l’ordre, une trentaine de blessés et des arrestations.

Le 13 janvier 1952, Habib Bourguiba déclare la lutte armée pour l’indépendance ; il est arrêté cinq jours plus tard.

L’indépendance sera réellement un acte de libération contre la domination turque et française. Alors, que reste-t-il de l’histoire ? Un port de plaisance, de pêche et de commerce, une ville qui, démilitarisée en partie, s’industrialise. Et la base aéronavale tunisienne la plus importante. 

Si proche Sardaigne
Aujourd’hui, Bizerte se réapproprie sa Côte Sauvage et développe (enfin) un tourisme écologique.



Un article de  Monak

Tous droits réservés à Monak. Demandez l’autorisation de l’auteur avant toute utilisation ou reproduction du texte ou des images sur Internet, dans la presse traditionnelle ou ailleurs.


 

2 commentaires :

  1. je suis vachement content de la lecture de ce texte ,grace a ma sœur,
    bcp de fierté et d'attente car binzarte et unique

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  2. content que l'on parle de Bizerte , qui est un peu une ville oublié en tunisie

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