Un film Mā'ohi-Māori
Pour souligner
encore les particularités qui ont émaillé le Fifo 2018, un petit
détour par cette 9ème nuit de la fiction avec"Ena Koe" coréalisation néo-zélandaise et polynésienne.
Tiairani
Drollet-Le Caill, productrice de Indigitale Tahiti, interviewée durant le
festival vous explique les circonstances de cette production fictionnelle. « Dans
le cadre du Māoriland film
festival
en Nouvelle-Zélande, la création de ce mini-métrage de 7 minutes a été un
challenge non-stop, de la conception au montage. Le tout en 72 heures ! Dans
l’équipe de Ena Koe, deux cinéastes māori, Hanelle Harris, Lennie Hill,
et un mā'ohi, Manuarii Bonnefin. »
Tiairani Drollet-Le Caill au FIFO |
« Ce n’est pas qu’un mélange de
nationalités, mais un mixage de compétences : à la fois scénaristes,
réalisateurs, techniciens et acteurs, les nécessités du métier encore jeune en
Océanie exigent qu’ils soient polyvalents. Cette section créative du festival, The Native Slam, ou Chelem
indigène, est fortement prisée car elle combine des idées, se confronte à
toutes les étapes de la réalisation, brasse les horizons, rassemble sur place de
jeunes étudiants en cinéma qui alimentent leur CV d’une expérience pratique et enfin…
des bénévoles. »
Seize nations et tous les âges :
« pas de limites de genres non plus… Chacun peut s’y essayer à tout moment
de sa carrière… ce qui mêle les points de vue et permet cette communication
constructive » māori-mā'ohi.
Lourd thème au ton léger
Ena
Koe
« aborde ce problème récurrent qui concerne la femme indépendante dans nos
sociétés. Elle travaille, elle a un gamin. Élever seule un enfant, c’est
souvent un casse-tête qui n’a pas d’issue. » Se perçoit aussi, avec la
présence de ce bébé qui ne parle pas avec des mots, mais dont le babil tente de
créer des liens, le sort des enfants de la séparation…
« Traiter
d’un sujet grave sur un ton léger, c’est peut-être une manière qui nous
appartient de ce côté-là de l’Océan, une question de climat (sourire) ? C’est
peut-être en éluder les approfondissements possibles… » Mais aussi, en
introduisant cet élément de suspense lié à l’apparition nocturne de ce bébé
anonyme, c’est entretenir un ressort dynamique dans le scénario.
Hanelle Harris, actrice and co… |
La
fin ouverte ne réduit pas le film à une histoire particulière, mais confère une
dimension universelle à… « la parabole. Une volonté de Manuarii Bonnefin
de laisser le spectateur libre d’interpréter la suite de l’histoire.»
Les mille facettes de Manu
Ça
y est, le nom est lâché ! Non seulement Manu est
réalisateur, mais encore il est l’un des acteurs du film. Tiairani,
présente au tournage, nous en apprend de belles : « Avec une échéance
si courte, chacun a assumé son rôle. Manu s’est autodirigé. » Le résultat
est loin d’être anodin : le personnage révèle à la fois sa situation de
mâle éberlué par ce qui lui arrive et maintient la pression à propos de cet
enfant venu de nulle part. Enlèvement, abandon ? L’acteur ménage ses
effets et nous laisse en haleine.
Quant
au dialogue entre le personnage et le bébé, l’insistance qu’il y met pour
obtenir une réponse…même s’il prend l’allure d’un monologue sans réponse, il apporte
cette note de gaieté et d’interrogation profonde à la fois qui donne toute son
importance au nourrisson : une personne à part entière, qui écoute,
comprend, vit et souffre. Ce genre d’évidences, notre monde a souvent
l’habitude de l’oublier ! Cette démarche est intéressante dans le film et
le valorise.
Un bébé au cœur du suspense... |
« Apprendre
le texte en māori, un autre défi que Manu a dû accomplir à 2 minutes du
tournage ! » Mais tout le monde connaît les capacités de mémorisation
des Océaniens !
Petit film, et déjà une histoire…
« Avec
un budget de 800 $NZ, le court-métrage a été bien perçu durant le festival
néo-zélandais. Il a remporté le 2ème prix du festival
néo-zélandais. » Il a eu une seconde vie avant le FIFO, à Tahiti, au cours du T
Tahiti Mā'ohi-Māori Film Festival en octobre 2017,
à Punaauia.
Dirigé
par Tiairani Drollet-Le Caill, ce festival accueillait, outre ses hôtes
Néo-zélandais, une autre production de Manuarii Bonnefin, Feti’a, qui a arraché les
prix du meilleur film, de la meilleure actrice et du meilleur acteur. Mais ceci
est une autre histoire…
Manuarii Bonnefin, un arôme d’acteur… |
La
courte-fiction est en bonne voie du côté des cinéastes océaniens et en Océanie…
Reste qu’elle manque de visibilité sur les écrans ou n’a pas encore vraiment
accédé à une place de choix… Elle transparaît encore comme un sous-genre,
puisqu’elle ne peut rafler davantage de budget.
Un article de Monak
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