Un panaché
La section "hors-compétition" du 18ème FIFO est assez complexe. S’y côtoient manifestes artistiques, idéaux de vie ou revanches sur le handicap, rétrospectives historiques et paris sur l’avenir, legs ancestraux de bien-être et… l’éloquente démystification du paradis tahitien !
Tout repose sur cette coïncidence entre Comité de sélection et film proposé par candidature . Rien ne semble fixé au préalable. L’esprit de la section résulte de l’amalgame qui en ressort. Ce qui attise la curiosité mais n’est pas forcément apprécié pleinement par les participants : surtout quand les films peuvent traiter de sujets trop voisins.
De la variété découle le succès, précisément de ce festival 100% numérique. Les statistiques, en pleine pandémie annoncent un chiffre supérieur de 5000 spectateurs au score de 2018 : soit 35000, juste après la diffusion du palmarès. Reste le week-end pour entériner ce scoop et que la plateforme numérique polynésienne puisse marquer des points. Ne rêvons pas cependant, vu les déconnexions coutumières inter-archipels. Quant au reste du monde cinéphile, peut-être mieux équipé et surpris par l’aubaine, je lui souhaite le réflexe du click pour découvrir les prolongations.
L’unité de la section "Hors-compétition"présente, s’il faut en trouver une tiendrait peut-être dans cet écho entre fresque historique et analyse des phénomènes, fondements ancestraux et regains actuels.
Du collectif ...
Pour en finir donc avec les utopies, citons : 04 novembre 2018 – le temps de l’identité* (NK) de Maxime Le Braz, autopsie du referendum de Nouvelle-Calédonie. Il ne fait qu’entériner l’illusion d’une identité commune et le clivage loyalistes/indépendantistes. Le cas d’un état dont 40% de la population originelle se trouve soumis aux lois d’une minorité inégalitariste. Le soutien financier étatique ne peut en aucun cas acheter les habitants. Le code indigène est périmé depuis 1946 !
Pour tahiti, l’invention du paradis (FR) le réalisateur François Reinhardt vide de sa chair avec véhémence le « lieu fantasmé de toutes les libertés, dont la France — pré-révolutionnaire — était alors privée. Un « mythe » qui semble résister à tout. »(1768). Pas de langue de bois pour décrier cette escroquerie insultante et scandaleuse : « L’argent et les essais nucléaires sont venus souiller une société déjà largement acculturée par une longue présence coloniale et religieuse. »
Renouerait-on avec le mythe des grands découvreurs, des expéditions purement scientifiques et dont les visées n’auraient pas visé de conquêtes ? Lionel Boisseau en dévoile les intentions et les codes dans explorateurs russes en polynésie, l’histoire inconnue* (FR). Avec illustrateurs, poètes chroniqueurs, journaux de bord et instructions du tsar, une saga riche mais totalement abolie des mémoires.
À l’inverse, gambier, le crépuscule des idoles* d’Antoine Laguerre (PF) où la christianisation commencerait par une prédiction pour s’achever sur le démantèlement de toute trace religieuse traditionnelle dans l’archipel : quelques rares trophées de tikis rescapés des autodafés trônent au Vatican ! En passant, petit clin d’œil au livre de Nietzsche qui, lui, se contente de se casser les idées sans être le prédécesseur de ce genre de pratique (« ou comment philosopher avec un marteau » 1888).
Une note à peine plus sereine et moins
amère pour clore cette sous-section. éric Beauducel, nous entrouve les
voies du caillou
(NC) : elles sont impénétrables, et l’avenir sombre. Exactement 4 ans
après nickel,
le trésor des kanak,
grand prix du jury 14ème FIFO (présidé par Luc Jacquet) où elles étaient pavées
de bonnes intentions !
... au particulier
…en conséquence, on aurait failli prendre : la route des arts – regards sur les objets polynésiens avec Frédéric Bouquet-Grili (FR) mais encore faut-il s’entendre sur les notions venues d’ailleurs et revendues ailleurs. Entre « arts primitifs » et « Tikis, Tapa, Tatouages » et autres objets cultuels ou utilitaires : cherchez l’erreur...
La voie de la guérison n’est pas plus simple dans le contexte tongan. Avec son approche ethnographique de the healer and the psychiatrist (RU), Mike Poltorak nous initiant en narrateur ponctuel, nous guide vers cette compréhension du « rôle fondamentalement thérapeutique des éléments affectifs, non verbaux et sensoriels dans les rituels de guérison »
Avec richard leplastrier – framing the view (AUS), un portrait ciselé et un concept architectural personnalisé, signés Anna Cater pour une étude étalée sur 15 ans. Sa spécialité le bois, son objectif un habitat adapté au vécu (personnalisé), fonctionnel, en symbiose avec la nature, ”sa clé, cadrer la vue” : un vrai créateur.
rebondir (NK), pour Florence d’Arthuys, c’est un challenge pour dépasser la mutilation et faire avec. Un moyen de se découvrir autre et de puiser en soi le courage de positiver son handicap.
Le Hors-compétition n’est pas le parent mal-aimé du FIFO. Il peut recevoir le Prix du public. « Il faut avoir une musique en soi pour faire danser le monde » (Niezstche).
Un article de Monak
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* https://outremers360.com/politique/web-doc-nouvelle-caledonie-4-novembre-2018-le-temps-de-lidentite
* https://lesfilmsdupacifique-tahiti.com/project/doc-crepuscule-idoles
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