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samedi 13 février 2021

Le OFF du 18ème FIFO


D'Outre-mer et d'Océanie

 

              Tropicalement vôtre ! si par hasard le 18ème parallèle sud traverse la Polynésie, le 14ème nord borde la Martinique. C’est donc une grande première si le FIFO se fraie un raccourci avec le littoral Atlantique : Guyane, Martinique, Guadeloupe. Et ce n’est que le premier choc à l’ouverture du festival.

 

          Quant au FIFAC (Festival International du Film documentaire Amazonie Caraïbes) qui vient de lancer sa 1ère "carte blanche" au FIFO, en sa deuxième année d’existence : « il s’inscrit dans la politique de création de festivals de films documentaires du Pôle Outre-Mer de France Télévisions ». Parmi les 4 films ultramarins invités, le poignant Scolopendres et Papillons, signé Laure Martin Hernandez et Vianney Sotès et primé en 2019.

L’inceste ! cet insecte venimeux 

Si l’innovation peut paraître incongrue aux navigateurs polynésiens de souche à quai en cette période de pandémie, les rapprochements ne sont pas si hasardeux :  étonnamment les insulaires des Caraïbes, comme leurs proches voisins amérindiens, pâtissent de l’isolement bien connu de nos archipels. Mais ce ne sont pas les seuls points communs. L’inceste, entre autres plaies des familles, sujet de ce film martiniquais, côtoie de la même  façon le mutisme farouche qui en découle : pour ne pas faire de vague… On en meurt à petit feu, comme on peine à survivre ; comme d’une morsure de scolopendre qui infesterait un papillon. L’horreur, c’est de le vivre au quotidien des cauchemars, des années durant, longtemps après, même quand le père incarcéré cherche la sortie incognito. « …douleurs qui n’aplanissent pas le temps… il me voulait ensauvager… sous eux, leur proie… planté comme une énigme en moi »

 

Walles Kotra en mission au FIFAC

Un documentaire, ça nous plante des statistiques, comme pour revenir dans le réel :  « 1 Français sur 10 a été victime d’inceste ». Traumatisme, stigmates à vie, vulnérabilité, durée de vie écourtée de 20 ans : on la  rompt quand, la loi du silence ? Sujet tabou ! Vous voyez ce que je veux dire !

 

Les vracs du FIFO

Le réel du FIFO c’est aussi 7 courts-métrages documentaires (de 4 à 27 mn) dans la catégorie "Fenêtres-sur-courts" - avec 4 pays en lice dont la Nouvelle-Zélande majoritaire -, et 10 courtes "fictions océaniennes ".. Nous aborderons plus tard la catégorie "Hors-compétition" en moyens et longs-métrages, car déjà les sujets récurrents se voient traités.

             Et puis, il semblerait, par coïncidence, que l’actualité urbaine de Tahiti dépasserait l’image : à peine le court-métrage Pa’ari du Polynésien Toarii Pouira, consacré au parcours du jeune boxeur Henri Burns, vient-il d’être diffusé que la rue s’embrase sous la pression des bagarres d’adolescents. Le mercredi, jour de relâche scolaire, impose son rituel au fil des années. Là, comme pour l’inceste, les délits accusent une croissance quasi exponentielle. La rue est devenue le théâtre des pires films dégoulinants d’hémoglobine. La réalité dépasse l’écran.

Henri Burns, un boxeur cœur sur la main !

à l’encontre de la démonstration du champion, en totale phase de résilience et maîtrise de son art, compensant une enfance malmenée, c’est avec son club de MMA qu’il intervient en « grand frère de ces jeunes en perdition, en manque de repères », déclare-t-il aux informations télévisées. L’occasion est belle, pour la Lucid Dream Production, de se conforter dans l’approche thérapeutique des arts martiaux qu’elle avait su appréhender avec justesse au niveau individuel pour lui conférer une dimension sociale.

Dans sa jeune carrière de réalisateur, Toarii Pouira aborde de front la violence, crue, à nu, avec la précision d’un chorégraphe-cascadeur, phénomène bien présent à divers niveaux dans la société polynésienne, non pour en faire l’apologie, mais pour terminer à chaque fois sur une pirouette : soit il la vide de son sens (Battle Dream 14), soit il l’explicite et en démonte le processus en révélant le coupable (‘Etene 19), soit il sublime le dépassement de soi à travers les figures, les chocs, ce mal-être, cette rage qu’il faut vaincre comme un obstacle (Pa’ari 20). Un aboutissement des plus complexes qu’il mène avec finesse. 

Rapides comme des courts

En moins d’un quart d’heure se règle un destin. La Nouvelle-Zélande, même inaccessible, cartonne. Le plus long, de Viv Kernick, course contre la montre, contre la mort : Pluck (NZ : plumer) joue sur les mots, c’est redonner vie aux plumes d’oiseaux rares morts accidentellement ; en confectionnant la cape royale traditionnelle (korowai), Jean tire le fil d’Ariane. Une histoire qui étire le temps qui peut paraître long, même en un quart d’heure. Mawhialeo ote alowha de Valeriya Golovina, joue sur ce genre de registre où l’attente se comble d’un espace qui sans cesse se peuple et se vide,  celui du cœur et du pays natal.

Le plus court, de Jess Feast, Mana Moana 3, en un jeu de projections sur volumes d’eau, fête le Matariki, le nouvel an maori. Pouvoir de l’eau, des yeux, du dieu, envolées lyriques pour renouer avec la tradition des origines. Méditation festive ? En contrepoint, silence et secrets de guérisseurs comme un baume sur les kauri exhument avec une pointe d’humour les vieilles légendes de cette fusion terre-mer. Plus soft, mais peut-être le changement de lieu (Cook), Our atoll speaks de Gemma Cubero del Barrio s’accorde-t-il au rythme de la vie.

La poésie, une arme non-violente

Dans un tout autre registre, pétri de fraîcheur et de dynamisme, This is the way we rise de Ciara Lacy semble coller davantage à la personnalité de la jeune poétesse et slameuse Jamaica Heolime Leikalani Osorio : une énergie non violente, qui tranche avec l’espèce de fatalisme de l’ensemble. Se pose la question de méthode : à quel point le réalisateur se fond dans son sujet ? avec les arbres de la forêt, l’atoll comme avec ses portraits. Ils vous rapportent souvent combien ils ont eu du mal à quitter les lieux de la captation ; combien les adieux sont déchirants parfois. En retour, ils sont imprégnés de la respiration, de l’âme des communautés qu’ils côtoient. Qu’ils en soient originaires ou non. Cet essentiel qui fait notre humanité.

 

Fictions Océaniennes brèves

Brève mais hard, Abîmes (NK) de Roland Rossero trace la dérive d’un jeune musicien que le succès déjante. Un prénom bien prédestiné, Cyriaque (NK) pour cette enfant de l’énigme. Daddy’s Girl (NZ) de C.E White : chez ces gens-là, le rire est périlleux. Allez savoir ce que cachent les portes de Down on the sidewalk in WAIKĪKĪ (Hawaï) de Justyn Ah Chong. Last Taxi Dance (H) de Brayden Yoder nous glace le sang avec son pessimisme. Le monde est-il vraiment réel avec Other People (H) de Bryson Chum. Qui saura résoudre les mystères de la mort avec MO’O d’Anela Ling (H) ? La mort, encore avec la tâche du héros dans Reverence de Keli’i Grace (H) ?

Un départ pour l’irréel

                  Assurément, la fiction océanienne ne baigne pas dans la gaieté. Une tendance à recourir au symbolisme ou au fantastique. Que se passe-t-il dans notre monde que l’humour semble plombé ?

 

Un article de   Monak et  Julien Gué

 

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