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vendredi 29 avril 2016

Nuku Hiva, heart of Marquesas



The land of men
Nuku Hiva is the biggest of the Marquesas Islands. After Tahiti, it’s also the second greatest island of French Polynesia.

Majestic, fantastic, dizzying, wild, bucolic... Nuku Hiva is the island of superlatives.

Nuku Hiva, 1500 km northeast of Tahiti, is 330 square kilometers of steep cliffs, impressive basalt needles, lush valleys, waterfalls, rivers, wonderful beaches often inaccessible. But it's also an incredibly beautiful tableland, a staggering canyon, a rocks desert...

Nuku Hiva: a fortified castle lost in the open South Pacific
Nuku Hiva is first and foremost, a history, a culture and a people, still alive.

Nuku Hiva, a young and lovely island
The Marquesas Islands are, geologically speaking, the youngest archipelago of French Polynesia, which explains both the absence of lagoon and the presence of impressive mountains with steep flanks.

The map of an island like no other
Nuku Hiva, the largest of them, is no exception to the rule. It even takes characteristics to extremes.

To get to Nuku Hiva, it's at Terre Déserte, the aptly named, where we land. Covering much of the west coast of the island, overlooking above a few tens meters the ocean, the area is an arid, dry and windswept plateau. On this part of the coast, one village is nestled deep in the Bay of Haahopu.

Terminal of Terre Déserte, aptly named
To reach the main city, Taiohae, you have to cross the island. For this, two possibilities: the 4x4 or helicopter.

Recently, the transverse road is concreted on almost all the route. First step, climb the mountain chain that overlooks Terre Déserte and get over a pass near the highest peak of the island, Mount Tekao, which rises at 1227 m.

From the pass, the descent to the plateau of Toovi
 There, change of scenery: a dizzying descent leads to the plateau of Toovi which hosts the main part of the agriculture and breeding of the island. After the drought of Terre Déserte, the contrast is startling.

Taiohae Bay as it appears
A new mountain pass to cross before the downhill towards the beautiful bay of Taiohae, about two hours drive.

Nuku Hiva and history
The Marquesan name of the Marquesas Islands is "Henua enana", meaning "Land of Men".

Nuku Hiva in ancient times
The first human traces at Nuku Hiva were found on Haatuatua beach by Robert Suggs in 1957. They allow to place the first settlement of the island about 150 years B.C.

Of Polynesian origin, this outsized seafaring people bring with them pigs, dogs, chickens and rats (without their knowing). They also carry coconuts, taro, yams and breadfruit trees.

Life is passing by, quiet and serene, allowing the colonization of the entire island and a substantial increase in population.

The legend of the Marquesas creation by Joseph Kahia
Around 1100 A.D., the population density has reached an excessive level and deadly infighting oppose the different communities of the island.

Part of the population chose exile and it was at this time that the small islands of Motane and Eiao are inhabited.

British Joseph Ingraham accosts the island in 1791, followed two months later by Etienne Marchand takes possession of the island (and of the whole archipelago) on behalf of France.

Despite the violent resistance of some dignitaries, particularly the chief Pakoko who ordered the massacre of five French soldiers, the Marquesan people should ignore its natural pride and grovel to the occupying forces.

French captain Etienne Marchand
 In the early 20th century, it remains at Nuku Hiva less than 400 inhabitants. Its population is decimated by imported diseases, alcohol and a terrible decline in fertility. And Nuku Hiva was very nearly to become again a desert island.

At the 2007 census, they were 2,798 living on the island. This figure ignores the significant diaspora to Tahiti.

Nuku Hiva, an Island with thousand treasures
Of course, this island exhibits sumptuous landscapes. Of course, the waterfall Vaipo (3rd highest in the world with 350 meters) is awash with light. Of course, the wild horses gallop in the mountains, such as cows and goats. Of course, hunting the wild pig is a fabulous hiking...

The impressive waterfall of Vaipo.
But there is also a wealth of archaeological sites, such as marae perfectly restored as Taiohae, or Hatiheu's old village reconstituted...

 Last but not least, there are people. How not to be mesmerized by the nobility of that people which, even today, long before being Polynesian or French, are Marquesan, even in the smallest details of everyday life?

Nuku Hiva, an enchantment...
If you are lucky enough to sympathize with any of the inhabitants of Nuku Hiva and he decides to introduce you to his island, so, you will never forget your stay and retain forever the desire to return to the Land of Men…

An article of Julien Gué
Translated from French by Monak


Copyright Julien Gué. Ask for the author’s agreement before any reproduction of the text or the images on Internet or traditional press.
 

jeudi 21 avril 2016

Sghaïer Ouled Ahmed



Poète du peuple tunisien

Vivante, brûlante, la poésie d’Ouled Ahmed, محمد الصغير أولاد أحمد, ainsi nommé pour faire plus court*, ne cesse de déranger. Coqueluche des contestataires de tous poils, comme de ceux qui ne soupçonnaient pas l’être… elle est parvenue à toucher les milieux les plus démunis. Car elle vient de là, du peuple. La Tunisie, unanime, s’y trouve représentée et le revendique : ce qui est extrêmement rare.

De milieu défavorisé, natif de Sidi Bouzid -ville emblème de la Révolution de 2011-, Ouled Ahmed doit sa popularité à son courage, sa sincérité, sa ténacité : jamais il ne s’est rétracté, jamais il n’a trahi les silencieux dont il porte la voix. Censuré maintes fois, interdit de publication, ses textes circulaient sous le burnous (le manteau), dits et redits par les jeunes de sa génération qui, devenus adultes, n’ont cessé ensuite de les déclamer et de les transmettre. Vous voulez vous en convaincre ? Lisez cet entretien « explosif », conduit par Salem Trabelsi dans le journal La Presse de Tunisie : « Ouled Ahmed — poète : La voix de la révolution »

Quand « J’aime mon pays comme personne » se chante en Syrie…

Essayons de nous plonger dans l’atmosphère de cette Afrique du Nord : la poésie en Tunisie fait partie du quotidien. Elle se transmet en direct, de bouche à oreille. De tradition orale, l’auditoire l’apprend vite par cœur et la scande à tous bouts de champ. On s’arrête pour la goûter, pour l’entendre s’écrire : au café,  sur la place publique, lors des manifestations, des assemblées familiales ou d’amis, au sein d’Associations. Que dire du « téléphone arabe » qui ne cesse d’en déployer les ondes jusqu’aux confins du désert ! Tout poète naît dans cet échange partagé et se fait reconnaître au pied levé. Simultanément, toute Maison de Culture programme les poètes… Un rituel ancestral d’improvisation poétique toujours vivant d’abord, mais aussi parce qu’ils sont gratuits. Il est bien des prestations payantes mais Ouled Ahmed ne se chauffe pas de ce bois quand il en est le chantre. La recette revient aux organisateurs…

C’est que, Ouled Ahmed, intellectuel de gauche impénitent (eh oui !), a toujours donné de sa personne, malgré les multiples sévices que lui ont fait subir les dictatures successives. Depuis qu’il a ouvert la bouche, il ne s’est abstenu de dégoupiller ses grenades verbales face aux régimes autoritaires de Bourguiba, de Ben Ali, et du « terrorisme religieux » (salafiste) d’Ennadha. Incarcéré, molesté, menacé, licencié de son emploi d’animateur culturel pendant 4 ans, il ne s’est pas vendu au pouvoir et en a refusé les décorations (1992).

 Les libres racines maternelles d'Ouled Ahmed
Quel message inconditionnel est porté par la poésie d’Ouled Ahmed ? Celui de l’arrogance d’être et de s’affirmer, d’en posséder les droits indéfectibles et égalitaires, de vivre sa vie, de protester, celui du combat pour la liberté civique et politique. Celui d’un peuple oppressé, maintenu sous dépendance policière, traqué, et qui revendique de choisir le destin de son pays. Et ce n’est pas sans malice qu’il dénonce cette mafia anonyme, « génération spontanée montante », présente dans toutes les familles : les indicateurs…

L’indicateur n’a pas maintenant à être dans mon ombre
Et lapider les oiseaux sur ma lèvre
Car je suis le roi de la nuit
Et je n’ai point de secret...
Sauf mon visage
Et mon encre qui coule sur le nombril de la capitale
Et que cela soit :
Je passerai seul la journée
Un sein me troublera soudain
Je saluerai le drapeau ! » (… Mohamed Sghaïer Ouled Ahmed)

Quelle poésie ?
La poésie en marche : celle qui se vit, va de l’avant. Celle qui sort du cœur et des tripes, celle qui parle de l’humain : les aspirations, les rêves de lendemains heureux. Ouled Ahmed développe, à l’écrit comme au vécu, un art qui mêle stoïcisme et épicurisme de survie : avec cette grandeur d’âme face aux revers, aux malheurs individuels et collectifs, et qui n’écarte pas l’amour, le vin, la femme et sa place incontournable et entière dans la société.

Sa muse ne s’enferme ni dans les cénacles, ni dans les pages des livres. Pugnace, elle ne se confine pas à une forme figée. Ouled Ahmed la désenclave. écrite surtout en tunisien, car le petit peuple des paysans et des pêcheurs, du berger qu’il était, ne parle pas l’arabe littéraire (la langue administrative). La poésie arabe ? Il la bouscule pour l’asservir à son verbe, il en décloisonne les formes figées. Alors, évidemment, ça dérange.

Le chantre de « la femme et demie »
C’est de l’actualité dont il parle, des consciences soumises aux gourous de la pensée unique, ces islamistes installés au gouvernement de 2011 et qu’il ne cesse de fustiger  à la Télé comme sur sa page Facebook. « J'ai eu ma part de la "culture" à propos de laquelle Rached Ghannouchi dit : " les salafistes en sont les missionnaires". Je ne suis pas le premier agressé ni ne serai le dernier. À partir de cet instant, je ne reconnais plus aucune légitimité et aucun civil ou militaire se taisant sur ces pratiques ne sera épargné par les bombes de la poésie et la foudre de la prose. » (2012)

Poète, prosateur, Ouled Ahmed fonde et dirige La Maison de la Poésie, de son ouverture en 1993 à 1997. Un de ces petits miracles, échappé du bon vouloir des tyrans, imbus de leurs largesses, sous la pression des intellectuels qui le soutiennent et du regard international. Miracle sans lendemain, car il se retrouvera à nouveau étranglé… et laissera la place à d’autres. Ils l’appuieront encore, jusqu’à la fin, durant sa maladie, traducteurs, peintres et calligraphes réunis pour cette édition trilingue de Poèmes choisis aux éditions Nirvana. Entre 2015 et  janvier 2016, il publie des œuvres récapitulatives, comme pour parachever l’un de ses premiers recueils  de 1984 : Mais je suis Ahmed.

La parole face à l’oppression
Il fallait oser malgré les représailles. Jamais il ne s’est enfermé pour dire. Sa plume dépèce, ainsi que vous pouvez le voir ci-après dans cette compilation de ses opinions. Car la génération née de l’indépendance muselée, décimée malgré des acquis constitutionnels indéniables, aspire au changement radical et en est le signe annonciateur.

La Maison de la Poésie en pleine Médina de Tunis
Quant à la révolution, elle n’a pas encore accompli toutes ses promesses. Laïque, Ouled Ahmed distingue la nation de la religion : « la démocratie n’a jamais été une affaire de religion. ».  « Je rappelle que je n’ai rien contre l’islam, je dis simplement que la religion ne doit pas être politique et s’immiscer dans la vie publique. »  Après la dictature politique nous subissons le diktat religieux.

Tenant à redéfinir les termes que nous ne voulons pas entendre, ainsi s’écrit-il :
« Je ne sais pas non plus pourquoi les médias étrangers et tunisiens parlent toujours de terrorisme mais ils ne prononcent jamais le mot «Terrorisme religieux» car ce qui se passe aujourd’hui c’est un terrorisme religieux... Il faut bien nommer les choses, c’est le propre de la pensée… Et ajouter l’adjectif «religieux» sinon on va diluer le problème. Si on ne nomme pas le mal on ne peut pas le vaincre. »

Une plume, une détermination…
Ouled Ahmed est aussi le chroniqueur du soulèvement de 2011 jusqu’à l’accession du gouvernement transitoire. Une page d’histoire dont il témoigne « au jour le jour » dans :   «Commandement poétique de la révolution tunisienne», paru dans sa totalité en 2015. Nous ne pouvons nous empêcher d’en publier un extrait  qui a fait le buzz. Cette déclaration marquait aussi le Sit-In du départ (demande de démission de l’Assemblée Constituante) après l’assassinat des leaders de gauche, Mohamed Brahmi et Chokri Belaïd :
« Nous parlons d’État civil, Ils parlent de Califat / Nous parlons d’État de droit, ils parlent de charia/ Nous parlons d’alternance de pouvoir, ils parlent de pouvoir divin/ Nous parlons de démocratie, ils parlent de conseil de choura
Nous croyons à l’égalité entre citoyens, ils divisent entre croyants et infidèles (…) / Nous croyons à l’égalité entre hommes et femmes, ils jugent la femme dénuée raison et impie / Nous identifions les femmes par leurs visages, ils identifient les femmes par leurs pierres tombales
Nous croyons au progrès humain, ils tuent le tiers pour corriger les deux autres / Nous sommes le mardi 6 août 2013, ils sont le 28 ramadan 1434 de l’Hégire
Nous fabriquons les crayons et les violons, ils fabriquent des sabres et des obus »


Contre la pensée unique de la dictature islamique 

Cette diatribe, comme tant d’autres, Ouled Ahmed l’assied sur la conviction et la force de résistance de ses semblables : « Je pense que ce qui a évité à la Tunisie l’effritement c’est son ancrage historique berbère et carthaginois dans la Méditerranée... »

Car les Tunisiens continuent à lutter pour l’obtention et le maintien de leur liberté individuelle, sur le terrain, comme sur le champ international. Ainsi, Ouled Ahmed était invité à Paris, en novembre 2015, par le « Comité Pour le Respect des Libertés et des Droits de l'Homme en Tunisie » (CRLDHT), organisme fondé en 1996.

La culture?
La culture ne fait pas concrètement partie des priorités d’un Ministère plutôt tourné vers le conservatisme d’un patrimoine en ruine… Avant la révolution, comme maintenant. Elle est le fait des artistes, des créateurs qui, comme les militants politiques sont fichés et jugés plus dangereux que les cimeterres des salafistes.

Un poète engagé
C’est dans ses circuits clandestins, qu’elle a réussi à subsister. Déjouant les contrôles, par un discours de substitution : s’exténuant dans une forme métaphorique et des images subliminales. Combien de fois les artistes ont eu « pour devise l’impertinence et pour méthode le détournement » ? Ouled Ahmed le déplore en ces termes : « En ces temps où le monde arabe étouffe on a besoin de voir la poésie affichée sur les vêtements des gens et sur leur poitrine dans les lieux publics ». Ainsi  la poésie underground a posé ses jalons…

À Tunis comme à Paris
Combien de fois les poètes ont détourné les mots de leur sens premier, claironné sur la noirceur de la nuit : Ouled Ahmed conviant ses confrères et sœurs à clamer avec lui comme le « Coq des esprits libres » (Dik el Jan), en des joutes poétiques à El Teatro, etc…

Combien de fois les artistes ont-ils fait renoncer aux coutumes serviles, transgressé les interdits caducs ? Les obsèques du poète n’ont pas été profanées par la présence des représentants de l’obscurantisme : l’un des dirigeants en a été « dégagé » par la foule. C’est de sa « Tounès, Touns », sa Tunisie, ce mot qui signifie le havre, la halte depuis l’Antiquité, que lui est venu le dernier réconfort, hommes et femmes confondus, comme à chaque enterrement d’artiste depuis plus d’une trentaine d’années…  à “Touns, J’abandonne la vie…

Parmi ses amis illustrateurs… Faouzi Maaouia
Si vous n’avez jamais vu Ouled Ahmed sourire, c’est qu’il portait le poids de cette terre violente et rude, vouée au tragique. Mais il ne larmoie pas. Il lutte, il ne s’apitoie pas sur lui, même à quelques mois de sa mort. Pas cabotin pour un sou, discret sur son intimité, il ne se prive pas de parodier et d’ironiser sur son sort, comme sur celui de ses détracteurs. Tel ce poème de juillet 2015 :
«Je dis adieu à ce qui fut et à ce qui ne sera plus / Je dis adieu à ce qui est bas et à ce qui est altier / Je dis adieu aux causes et aux effets / Je dis adieu à la voie et aux méthodes / Je dis adieu aux cervidés et aux larves / Je dis adieu aux embryons, aux individus et aux collectivités / Je dis adieu aux pays et aux patries / Je dis adieu aux religions / (...) / Je dis adieu à ma plume et à mon horloge / Je dis adieu à mes livres et à mes cahiers / Je dis adieu aux péchés véniels et aux péchés mortels / Je dis adieu à mes cigarettes / Je dis adieu aux menottes et aux chaînes / Je dis adieu aux fantassins et aux frontières / (...) / Je dis adieu au mouchoir qui fait adieu / Je dis adieu aux mouchoirs qui font adieu / Je dis adieu aux larmes qui me font leurs adieux / Je dis adieu aux adieux

Une signature sur calligraphies…
Et terminons sur un pied de nez, poésie oblige :  
« Quand je serai mort
Seuls auront marché derrière moi ma plume
Mes chaussures
Et le rêve des bourreaux »


Un article de  Monak

-* Son prénom est Mohamed al-Sghaïr (Mohamed le jeune). On ajoute cette précision, car son père ou son frère aîné devaient aussi s’appeler Mohamed. Ouled Ahmed est le nom de famille (type de nom rare en Tunisie, il se réfère au nom d’un grand-père, patriarche d’une tribu (ouled = enfants d’) Ahmed. En Tunisie on l’appelle couramment Sghaïr Ouled Ahmed, on omet Mohamed (Jalel El Gharbi)

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