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samedi 4 mars 2017

FIFLASH 2017 – 05



Sans eux…

Sans spectateur, le cinéma fermerait boutique. Cette évidence, certains circuits de distribution l’ont expérimenté douloureusement. Ce qui n’est pas le cas du FIFO. Chaque année, il met en lumière : un bout de terre, un pan d’histoire ou des cultures océaniennes occultées. Il augmente son audience en axant sur le potentiel des scolaires d’ici… Autant prendre le pouls du Pacifique à l’âge tendre… être en symbiose avec sa réalité.

L’Université affrète des bus pour les étudiants du campus. Mais le public ne tient pas que ce rôle d’assistance, siégeant sur de mauvaises places, redoutables pour les fessiers. La particularité du FIFO, c’est de proposer cette plateforme d’échanges entre cinéastes et public : découvrir, se reconnaître dans les peuples frères… faire passer le message des préoccupations d’ici, Tahiti, et d’ailleurs. C’est ce qui le rend humain… et cette convivialité-là, il n’est pas question qu’elle se perde.  

Au royaume mythique d’Atooi


Certains quittent leur archipel et se font héberger en famille, pour suivre le Festival in extenso. D’autres, pour guetter la caméra attentive qui voudra bien porter leurs doléances insulaires. C’est ainsi que sous le banian, trônaient les descendants Pa'umotu de l’originel royaume d’Atooi, une ″succursale″ du mythique berceau d’Hawaï. Les traités d’annexion ayant été « négociés » à la va-vite et à l’encontre des évidences savamment ignorées… surgissent les revendications autonomistes…

Public
Dans les salles obscures, il a été demandé de ne pas manger, de ne pas circuler, de s’occuper de ses gamins, d’éteindre les engins portables… Heureusement ! Car à chaque nouvelle édition, la foule des contrevenants récidive sans vergogne. Le réflexe chips-devant-télé et autres incorrections prolifèrent avec ardeur. Mais il n’a pas été recommandé de se taire, ni de réagir. Et c’est tant mieux. Place donc, à la parole.

Terii Félicité Fauura Leduc, tantôt poussée sur son fauteuil par quelque main charitable, tantôt circulant à la force des bras, s’en explique. Un panaché entre Servant or Slaves, The Family et Te Reo Tumu pour dénoncer les abus, la déshumanisation et l’ignorance. : « Je ne vais pas laisser faire ! Il n’y a pas que les Aborigènes qui soient maltraités, les blancs et nous aussi… Dans mon enfance, il n’y avait pas que la loi de l’école qui était intolérable. Ma mère ne supportait pas que je lise à la maison. Et moi, je fuguais pour aller au cinéma. Le résultat, c’est que j’ai été institutrice. Les petiots, ils n’avaient pas seulement besoin d’apprendre, mais aussi de manger… La misère, c’est aussi chez nous, à Tahiti.» Le summum de ses déclarations… devait venir sur une vidéo… mais, grave incident technique, elle est inexploitable… alors, je transmets quand même :

Terii Félicité et la cruauté des bien-pensants…
Elle avait pris, entamant sa petite pause-déjeuner, un court moment pour se maquiller au pied-levé. Désolée pour elle, je ne peux vous livrer son indéfectible sourire, même sous l’éreintement. Elle ne ménage pas « les fausses églises, et les faux pasteurs : c’est épouvantable en Australie : qui sont ces gens ? des profiteurs, des quoi ? On croyait que c’étaient des gens pour Dieu. Ce n’est pas pour Dieu, c’est pour leur poche… et ils sont capables de tuer. Affreux ! Moi j’ai pleuré. J’adore le FIFO : on y apprend beaucoup de choses, des choses essentielles qu’on ignore. Je suis parfois très en colère et je réagis ; j’ai pitié des miens. Il est des îles qu’on méprise ; les Marquises, elles sont loin, n’ont pas de docteurs, n’ont rien. J’y suis allée avec Michèle de Chazeaux et on a vu avec consternation, la désolation qui y règne… Je ne peux pas laisser faire ! Non, je ne peux pas…» Et dans son regard, l’affliction. Merci pour ce témoignage, Terii ; et pardonnez-moi de vous avoir autant bouleversée…

Protection civile
Ils sont là, prêts à intervenir. Petite équipe, ils ne sont que quatre : du coup, ils n’ont pas le loisir de voir des films : ce serait trop risqué pour notre sécurité. La discipline est stricte, le protocole d’intervention hautement planifié. Mais c’est avec plaisir qu’ils constatent ne pas avoir à assurer beaucoup d’interventions d’urgence.

Pour un FIFO en toute sérénité.
Quasi pas d’incidents. Mais ils sont là, et ils veillent sur tous.  

Au printemps de l’âge
Bénévoles, jeunes étudiants ou sans profession, ils sont à disposition du FIFO. Par petits groupes ils viennent prêter main-forte, là où ils sont appelés : pour la mise en place, les diverses tâches qui font la bonne marche des événements du festival. Souriants, ils vous informent et vous guident dans le village cinématographique improvisé.

Les équipes de l’ombre…en plein soleil
Une façon d’être proche de ce rendez-vous culturel, auquel ils peuvent participer ; si ce n’est que sporadiquement pour le visionnage des films, incidemment pour les débats. Il est bien des rencontres internationales qui leur ouvrent l’esprit. Du moins, éprouvent-ils plaisir dans ce bain d’images « qui les rapprochent de leurs origines ». Du moins, se sentent-ils « doublement vivants en partageant l’esprit de ce rassemblement et en mettant en commun leurs découvertes ».

Bleu FIFO…
Cette année, le bleu était couleur-FIFO. À la prochaine… alors.

Fifotez, fifotez, il en restera toujours quelque chose !



Un article de Monak
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À lire aussi :
-Treize articles à la douzaine traitant du FIFO 2017, tout comme des autres éditions depuis 2012, à la rubrique « Cultures », sur notre Webmagazine : « Tahiti, ses îles et autres bouts du monde ».


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