Sensuelle,
la Poésie ?
«…vous
êtes mon délice des sens » imprègne de sa trace les pages du premier
recueil des Amours de Profil de Nathalie Cougny, comme une entrée en
poésie. Son entrée en peinture est plus ancienne. L’auteure noie aussi ses
impressions sur la toile.
La
sensualité, c’est ce ravissement des sens, cette soif inextinguible, cette
exigence, ces vœux, cet espoir, ce désir, cet appel, cette aspiration et cette
altération, cette âpreté et cette ardeur qui entretiennent la relation ?
Entre les pages d’un Carnet Amoureux |
C’est
ce dialogue ininterrompu qui ne peut que se clore par une question : « Sur les rives de mon corps, / tandis
que la nuit dort / vibrent des rimes d’amour, / des pourquoi, des toujours. » Sensuelle, sa poésie, pour allier
corps et sentiments ?
Correspondances
Mais
avant tout, elle est élan, tension vers un accomplissement de soi, de l’autre
et réciproquement. Recherche de perfection humaine. Elle est spiritualité.
Elle est fusion aussi. « Être, exister, vivre… dans l’instant
de ton temps… te vivre ». Avec cette quête mythique du double, elle se
confond avec la mort. «J’attendrai
l’ultime instant, le dernier / pour te vivre pleinement. »
«Au beau matin de cette vie je rêvais d’improbable» |
Elle établit des analogies, bien avant même de
quitter la forme versifiée pour la lettre en prose. Correspondances entre soi
et l’autre, entre soi et le monde. « Tu
as pris mon visage, comme pour toucher l’irréel, /Et goûté mes lèvres, pour me
vivre, éternelle. /J’ai perdu pied dès l’envol de nos mots…»
Votre
correspondant n’est pas disponible…
Mais
elle est aussi tourment, incertitude, quête, perte et absence. « Tu me manques, /comme le temps à la
vie !... Tu me manques, / comme le temps
à l’oubli. »
Oscillant
entre un « Je », un « Tu » qui englobe aussi les accords du
« Nous », la poésie de Nathalie
Cougny se répartit entre des carnets intimes, des poèmes, une prose
toujours adressée à un partenaire ou à un correspondant. Elle se teinte
d’attentes mais aussi de réponses. « Il
a envie de vous subtiliser avec ses mots, de vous enivrer avec son émotion pure
et belle. / Il vous caresse délicieusement pour mieux s’emparer…»
La peau de mon ventre, offerte, envahie, du plaisir diamanté |
C’est
que, l’écrivaine, comme nombre de ses contemporaines, s’adonne au clavier.
D’abord, en bribes furtives, au plus noir de la nuit. Puis elle les distille
sur le net. Le bonheur de l’instantané, mais aussi l’expérience du virtuel. « … nous ne sommes peut-être jamais voués à nous rencontrer, à
nous découvrir par le toucher… »
De ta peau
à ma peau
Si
la poésie de Nathalie Cougny, s’épand en douceur et en volupté, des expressions
comme « l’avoir dans la peau », « coller à la peau »
prennent tout leur sens, mais en toute délicatesse. Bien d’autres encore
« jouer sa peau », « perdre sa peau », « tenir à sa
peau », « n’avoir plus que la peau »… se déclinent à l’envie. « Il n’y a jamais de heurt qui ne dure,
jamais une parole en trop, pas de tension. C’est très calme tout en étant très
puissant ! »
La
peau semble représenter à la fois l’entité, l’être tout entier, mais aussi le
réceptacle et l’émetteur des sensations. Les images s’affolent. Avec la peau,
la sensualité est portée à l’extrême, au paroxysme de la jouissance. « Je voudrais être en toi, fibre et
peau / Je voudrais me confondre, à demi-mots ».
J’ai accroché ma vie aux souvenirs de ta peau |
Ainsi la peau assume sa réalité charnelle,
vibrante,orgasmique. Elle devient corps, passion, pensée : « Quand ta langue frôle les rêves de ma
bouche, /que tes yeux soutiennent le vertige qui me touche, / que ton sexe
cherche comment pénétrer cette connivence, / que ton âmes’infiltre dans cette
permanence, / prends ma vie, prends-moi, prends toute cette évidence ! »
Au plus
profond du plaisir
D’abord, encore et toujours, la reconnaissance
mutuelle, comme une nouvelle naissance, à soi, à l’autre. « Nous naissons donc déjà enchaînés à des souffrances qui ne nous
appartiennent pas… ». Devenir autre et avec l’autre. L’amour ne peut
s’entacher de remords. Tout au plus d’un adieu. Il comble comme l’instant qui
succède à l’instant.
Nathalie Cougny sur le vif
« Qui
es-tu ? D’où viens-tu ?
Comment définir cette relation atemporelle,
qui me dépasse, que j’assume sans crainte de rien, ni même de me faire du mal.
Il n’y a pas de souffrance.
Je n’ai pas peur.
Je suis juste étonnée de tant de beauté, de
ressenti de vie…»
« Nos bouches usaient les silences pour s’aimer » |
Dans
cette joute amoureuse, les rôles s’intervertissent et se croisent, à la fois
protecteurs, rassurants et tendres, ouverts, fantaisistes et séduisants. Ils
portent la gravité du devenir. « Je
suis l’horizon des matins clairs, qui apaise tes craintes et te voit grand. /(…)
Je suis ce rêve fragile, qui renaît chaque nuit et qui t’élève dans la
plénitude. / (…) Je suis celle qui te devine, les yeux fermés, et qui voudrait,
par là même, enchanter ton être, tout entier. »
Une réalité qui se vit sans jamais se
rassasier, une poétique à la mesure de la vie, insatiable : « Comme un gouffre aspirant nos envies,
/ étranglés par cette soif de nous, / nos corps frissonnants supplient le temps. »
Un article de Monak
-
Pour rencontrer
Nathalie Cougny ? Bruxelles, le carré des éditeurs à la foire du livre (8
au 10 mars 2013), le vendredi et le
samedi de 15h à 19h. »
Tous droits réservés Monak et Julien Gué. Demandez l'autorisation de l'auteur avant toute reproduction du
texte ou des images sur Internet ou dans la presse traditionnelle.
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