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vendredi 28 octobre 2011

Tour d’horizon tunisien


Tunisie : l’aujourd’hui et l’histoire


        La Tunisie, petit pays de la Méditerranée du Sud (au 90e rang mondial pour sa superficie), semble avoir étayé son destin sur la dynamique constante du melting pot.
    
          Promontoire maghrébin de l’Afrique, à 200 kms des côtes européennes, elle semble avoir adopté l’esprit de ce poisson fétiche qui dessine ses contours : l’hippocampe.

      Fluidité de l’animal marin qui prend son temps pour intégrer les diverses influences qui le traversent, mais aussi emblème du cheval associé à la mer, sa liberté, son audace, sa vigueur.

La tradition de la culture

          L’un des phénomènes qui semble le plus avoir marqué la Tunisie au lendemain de la libération du 14 janvier 2011 s'exprime, dans une majorité de gouvernorats, par un  bouillonnement créatif, l'exercice de la festivité inventive.

Laissez-nous écrire Notre  Histoire    
           L’une des associations artistiques tout juste réalisées au sud du pays, en plein désert, dans la ville même du poète national Aboul-Qacem Chebbi, représente plus qu’un symbole.

          Le doit-elle au jeune poète qui a tant bouleversé les mentalités en Tunisie ? Originaire de Tozeur, contestant à Tunis la sclérose de l’enseignement scolastique de la Zitouna, il parlait déjà de réforme et de modernisme. Des dates phares dans sa vie, tel le boycott de sa conférence le 13 janvier 1931. Il y critique la «médiocre vision que les Anciens poètes arabes accordent à la Femme  qui ne la chantent qu’en tant qu’objet de leur désir et de leur convoitise charnelle»

           Novateur, attaqué violemment de son vivant au Moyen-Orient, surtout par les salafistes (déjà ou encore eux), il meurt le 9 octobre 1934, âgé de 25 ans. Dès lors, le poète révolté de la « Liberté, de l’Amour et de la Résistance », commente Abderrazak Cheraït (dans le livre cité ci-dessus), est, aujourd'hui encore, considéré comme le plus grand poète arabe du XXe siècle.

Une oasis culturelle

           C’est dans cette même oasis de Tozeur que naît en 2011 Hippocampe, Art et Citoyenneté, l’association qui veut dynamiser un tourisme culturel.

           La création artistique s’abreuverait aux sources d’entre les sables, comme jadis, il y a très longtemps, à l’ère préhistorique, quand le Jerid était une zone tropicale humide.

Nadia Ghrab, ingénieure et à l’Hippocampe 
               La fondatrice, Nadia Ghrab, souhaite « contribuer à reconstruire une Tunisie nouvelle » parce que « nous sommes dans un moment, affirme-t-elle, où nous avons l’impression que tous les futurs sont possibles. »

           L’Hippocampe, un sigle choisi pour « ce petit poisson très raffiné, mystérieux, qui a un cheval… navigue librement dans toute la Méditerranée, sans visa, sans frontières. » ; mais aussi pour « cette zone du cerveau responsable de la mémoire (donc, du patrimoine et des émotions), donc de la créativité artistique. »

             Il semble s’avérer depuis l’Antiquité que le pays n’ait cessé d’évoluer sur les lignes originales de bases nouvelles.

La Constituante 2011 
         C’est ainsi que se nomme la Cité d’Alyssa, fondatrice en  814  de Kart Hadash -la ville nouvelle- Carthage : pays que s’édifiaient les Phéniciens, sur le fond berbère d’origine. Déjà une intégration pacifique mutuelle, sur un troc de peau de vache (Byrsa).

            Carthage, terre des Arts et des Lettres. Territoire du syncrétisme : une reine, une déesse, Tanit. Le savoir, la poésie et la danse en partage et sans conteste entre les jeunes gens des deux sexes.

A la croisée des métissages

           La Tunisie est cet espace qui fait fusionner trois pôles : L’Afrique, l’Orient et l’Occident. En constante ouverture sur l’Orient de la Méditerranée, avec la Grèce, venue asseoir ces légendes des Lotophages et les premières communautés juives  sur l’île de Djerba.

Ma Tunisie...
           Puissance maritime punique qui a conduit les navigateurs du Golfe de Guinée aux portes de Rome. Mais qu’on se rassure, si les manuels scolaires français ne consacrent pas de pages à l’Empire Carthaginois, les sites des deux rives en portent encore les empreintes, quelles qu’en soient leurs ruines.

           Carthage détruite –Delenda Cartago– en 146 av-JC, une seconde Carthage est rebâtie sous Jules César. Une civilisation romano-africaine s’y développe pendant VI siècles, avec ses particularités.

            Christianisée comme le reste de l’empire romain,  un épisode d’invasions Vandale, puis son rattachement à Byzance avant la conquête arabe en 647. La Kahena, guerrière berbère s’y oppose et meurt, encerclée dans l’amphithéâtre d’El Jem, la porte du Sahel.

            Le prénom fleurira dans les milieux féministes des années 80, tout comme ces revues (Nissa) qui revendiquent cette égalité perdue.

Une mosaïque d’influences

             Et dans cette forme cinématographique du road movie qui s’est développé tout au long de ces derniers mois, comme pour témoigner, mais aussi interroger et se poser des questions, la même attitude de l’« œuvre ouverte ».

          La production artistique qui ouvre les vannes de la sensation, des impressions, de la soif de vivre : sans censure.

             Mais aussi celle qui ne prend  pas parti et laisse la réponse au spectateur.
            Il s’est développé comme un jeu pour explorer les impressions les plus à fleur de peau. La série Post révolution (1 à 6) de Mahmoud Chalbi, tantôt avec incrustations de vidéo, tantôt en montage de photos comme : De Fedele au Pôle, un film de Mach ! [HQ]. Cette période commence quelques mois avant la révolution, s’intensifie avec le portable amateur et le film professionnel de TUNIS MIX.

          La production est prolifique en quelques mois avec les courts-métrages de Nadia El Fani, relayés par celui de Mourad Ben Cheikh.

           Lotfi Dziri, auteur, comédien et réalisateur du documentaire Tunisien : Pourquoi et Comment, tourné pendant l’été 2011 et sorti fin septembre, résume un peu son travail ainsi : « Tunisien, pour quelle identité, pour quel projet ? »

Un tournage à la cow-boy...
         Il  déclare au lendemain des élections constituantes tunisiennes : «Trois mille ans partis en fumée. Messieurs de la nomenklatura, avides de pouvoir et en extase devant votre ego surdimensionné, vous avez réussi ce que César lui-même ne parvint pas à faire de son temps : Effacer de la carte du monde un pays exemplaire en tout point. Attendez-vous, camarades justes et braves aux plus affreux des ténèbres. Les héritiers du RCD et les assoiffés de pouvoir ont livré notre histoire à un autodafé dont on ne se relèvera plus jamais.»

           Une page d’histoire contemporaine que les Tunisiens de tous bords écrivent, brouillonnent, raturent et commentent en même temps. L’histoire en direct ?

Un article de MonaK




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