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lundi 11 février 2019

16ème FIFO, palmarès


Fenêtre-sur-courts


Je raffole de cette appellation "Fenêtre-sur-courts", tant elle me rappelle "Fenêtre sur cour" d'Alfred Hitchcock, le suspense, le désir des voyeurs que nous sommes... Longue attente du coup, pour vous en faire partager le palmarès, à la toute fin du festival.

"Prix du meilleur court-métrage documentaire" décerné à Aprila de Rohan Radheya (Papouasie occidentale) : la récompense d’un engagement exemplaire de la part du réalisateur, journaliste de surcroît, l’invisible Radheya Rohan, militant de la liberté d’opinion dans son propre pays, à ses risques et péril. J’en profiterai pour livrer aussi mes impressions sur le primé de la "10ème nuit de la fiction" :  Undiscovered  Country de Tyson Mowarin (Nouvelle-Zélande). Que d’émotions !

Des jeunes en mal de vivre…dans "Undiscovered Country"
Encore  une fois, et pour sa 16ème session, le FIFO nous immerge dans le contexte des îles d’un océan, pas vraiment “Pacifique”, aux velléités voraces. L’Océanie n’est plus le continent insubmersible, certains archipels en subissent déjà le contrecoup. L’environnement à la fois géopolitique, naturel et humain, se trouve bien malmené. Entre dérèglements sociétaux, convulsions politiques et coercitions socioéconomiques, des pans de culture sont vouées à l’agonie. Que de ravages en perspective !

Aucune "île flottante" à l’horizon, tirée par le va’a* mythique...  Le FIFO réussira-t-il à ouvrir l’œil du monde sur les populations insulaires, exclues, précarisées, en voie de réfugiés climatiques, nomadisant sur leurs petits cailloux ?

Journalistes otages

Personne n‘en parle dans le monde, les journalistes étrangers, persona non grata en Papouasie comme sur l’ensemble du territoire indonésien : le black-out est médiatique. Pire, les journalistes papous sont les otages de groupes de pression, harcelés par les services de sécurité, les indépendantistes, des anonymes, des concernés, des taupes.

Alors comment exercer, surtout quand la situation politique s’enflamme ? Comment éviter les menaces et les représailles  quand l’information se trouve acculée à passer par le filtre même de l’autocensure ?

Un prix hautement gagné
            Radheya Rohan mène son documentaire Aprila à travers le prisme d’une cascade de mises en abyme où la jeune journaliste, témoin d’affrontements sanglants, s’isole puis se terre. Avec des images choc, le réalisateur poursuit sa mission d’information. Il ouvre des brèches intimistes sur la raison de vivre du métier. Le tout, en 18 minutes !

Le pays inexploré...

La couleur est aborigène, oui. Du thème, à la production Weerianna Street Media, des acteurs dont feu Balang.E.Lewis au réalisateur, Tyson Mowarin. A quel dérivatif pire que l’alcool les jeunes peuvent-ils s’adonner quand ils sont exclus de fait, de l’Australian Way of Life ?

En une pérégrination dans le bush, digne d’une marche forcée disciplinaire, ou d’une retraite au désert style prophète avant le choc de la révélation, Undiscovered Country conduit les graines de révoltés, la génération de demain, à se réapproprier spirituellement leurs terres d’origine.

La leçon des aînés
           Se transcenderont-ils pour transfigurer leur lendemain? Toujours est-il que cette graine d’acteurs ne passe pas inaperçue !  Une parabole des temps nouveaux pour un rituel d’initiation des plus modernes.

Du racisme ordinaire

Le FIFO exhumant à foison les pans de l’histoire ou les ethnies minoritaires d’Océanie, il me paraît intéressant d’évoquer un autre court-métrage poignant de la section Fenêtre-sur-courts : Tama Uli – Tales of Time. 

Serait-ce une malédiction qui poursuit immanquablement les descendants des esclaves noirs pour qu’ils soient encore exclus de leur terre de détresse. Victimes du "blackbirding ou merle noir" au début du 19ème siècle, ces razzias qui sillonnaient le Pacifique pour coller les captifs dans les plantations ou les mines du Pacifique…

L’océan de larmes : Tama Uli
Aux Samoa, lieu de tournage, lieu d’histoire, les Tama Uli, les Noirs et leurs descendants subissent cette exclusion, héritée d’autres temps, d’autres idéologies d’humiliation et se perçoivent comme les « plus pauvres des pauvres ». Jusqu'à quand ?


Un article de  Monak

Va’a* : pirogue à balancier


             Tous droits réservés à Monak & Julien Gué. Demandez l’autorisation de l’auteur avant toute utilisation ou reproduction du texte ou des images sur Internet, dans la presse traditionnelle ou ailleurs.



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